Steve Tesich

on aura tout lu !

(et merci bix pour ton commentaire qui me remet à l'oreille le texte tellement incroyable de Tesich et ce personnage fabuleux de Karoo...)

chance ma médiathèque le possède ! mais non disponible jusqu' au 12 mai, je note

Je crois que je n' ai peut etre pas assez insisté sur les réserves que cette lecture a provoquées en moi
au point d' avoir des impressions mitigées.
Déjà la structure du mélo ne fonctionne bien que jusqu' à un certain point. Et un certain moment.
Et je crois qu' il faut vraiment adhérer à 100/100 avec la manière dont Tesich manoeuvre son lecteur
et l' entraine jusqu' au bout.
Personnellement, j' ai décroché dans le dernier quart du livre, au point de me demander si la maladie qui a emporté l' auteur n' avait pas modifié sa narration et meme son style. Son projet meme... ?
Cette série d' images métaphysiques, qui se veut flamboyante comme l' était 2001, Odyssée de l' espace, est toc.

D' où ma conclusion sur une lecture cyclothymique et plutot descendante du livre.

Karoo

Karoo se laisse totalement aller. Tout lui est égal mais pas consciemment, pas par mépris. Tout est paradoxe dans sa vie, Il n’aime pas la vie mondaine mais s’y plonge. Il dit qu’il n’arrive pas à aimer mais aime tout de même. Il n’arrive pas à s’inquiéter, comme si son angoisse prenait une autre forme. L’alcool n’arrive pas à anesthésier cette angoisse, qu’il ne ressent pas.

Karoo a l’air d’attendre la fatalité d’une manière cynique.  Il est las de ses maigres tentatives pour être « un homme bien ». Il s’organise, Il digère, fait le bien en faisant le mal de l’autre côté.

Karoo ne supporte pas l’intimité. Ça le ramène à ressentir, à être en face de lui-même. Il a besoin d’un public pour vivre son intimité. Pour avoir l’assurance de l’intérêt et du sens que peut avoir ces tête à tête intimes. Il a besoin de se regarder et qu’on le regarde. Plus les gens sont proches de lui, plus il ne peut les aimer que de loin.

Karoo prend des risques….pourquoi ? Pour ressentir ? Il ne veut plus être dans ce monde sécurisé où tout est écrit comme un scénario bien rôdé? Sa femme est orfèvre en la matière. C’est une actrice qui met en scène leur vie, ses failles et a besoin de se sentir sa victime perpétuelle. Il la laisse faire comme un spectacle auquel il assiste et qui lui ramène un public. Elle le provoque et il ne la contredira pas si elle est heureuse comme ça. Il satisfait les gens dans ce qu’ils pensent de lui.

La deuxième partie est moins introspective. C’est un récit qui commence. Leila entre en jeux. Il l’aime. C’est assez beau l’effet qu’elle lui fait. Est-ce que  Leila le voit tel qu’il est et ça lui donne l’espoir de se reconnaitre enfin ? Il dit qu’il a reconnu chez elle la nudité, quelque chose qui  n’est pas tronqué.

Steve a bien su raconter l’ambigüité de cette personnalité complexe qui m’échappe parfois. Il a bien su raconter la distance qui fait souffrir.
Il raconte bien cet homme, au bout du rouleau, qui est impuissant et las face à ses problèmes.  Un homme qui est obligé de trouver des subterfuges, de s’inventer des difficultés puisque tout lui cède trop facilement. Un homme qui veut se donner l’illusion qu’il règle les choses comme tout un chacun le ferait.

Il arrive bien à traduire le paradoxe qui habite la vie de karoo à chaque instant. Il a des problèmes insolubles, et pourtant il y a trop de facilité dans sa vie. Il est pris entre les deux et tourne toujours comme un serpent qui se mordrait la queue.

C’était plutôt les actes d’hommes comme moi. Des hommes avec des critères moraux et esthétiques d’un ordre supérieur…quand ça les prenait. Des homme qui savaient distinguer le bien du mal et qui agissaient pour le bien, quand ils étaient dans cet état d’esprit. Mais des hommes qui n’avaient pas d’amarres pour maintenir ces convictions et ces critères en place.

L’eau chaude continue de couler du pommeau. La vapeur monte et s’épaissit. Dans la démocratie égalitaire de mon esprit règnent la tranquillité et une égalité totale. Rien que de la soupe.  


Cette lecture m'a ravie.

Contente que cette lecture t'ait plu, et merci pour ce commentaire !

Citation :

Karoo prend des risques….pourquoi ? Pour ressentir ?

c'est une explication intéressante...

colimasson a écrit:

Contente que cette lecture t'ait plu, et merci pour ce commentaire !

Citation :

Karoo prend des risques….pourquoi ? Pour ressentir ?

c'est une explication intéressante...

Pas de quoi!

La lecture de Tesich -comme la plupart des oeuvres- est ouverte à bien des interprétations.
La mienne a varié et s' est meme désolidarisée du texte à la fin.

bix229 a écrit:

La mienne a varié et s' est meme désolidarisée du texte à la fin.

Tiens! Pourquoi? Raconte.

pia a écrit:

bix229 a écrit:

La mienne a varié et s' est meme désolidarisée du texte à la fin.

Tiens! Pourquoi? Raconte.

J' en parle dans mon commentaire. Mais si je le relisais Karoo, il est possible que je réagisse autrement. En fonction du moment, de l'humeur...
Bref...

Et tu crois qu’un changement d’humeur pourrait aider à te faire relire le livre ? Tu m’avais l’air vraiment gêné par certaines choses. Mais en effet c’est tout à fait possible.

Karoo :

Je vais rejoindre l'avis de Bix. J'ai été peu convaincu par la dernière partie du roman. Je trouve que c'est trop, trop gros.
Je ne sais trop que penser de ce bouquin, j'ai lu les 600 pages quasiment d'une traite. C'est plaisant, mais rarement jubilatoire.
Le problème c'est qu'on me l'a bien vendu, je m'attendais à un pur chef-d'oeuvre. Je ne dirais pas qu'il est mauvais, car j'ai pris pas mal de plaisir à la lecture, mais si le style est fluide, il m'a paru assez pauvre tout de même. Les ficelles un peu trop faciles.
Le début m'avait bien emballé, mais c'est retombé comme un soufflet. Dommage.

et bien moi, j'ai été totalement emballée par ce livre !
et je trouve que la fin est une véritable apothéose.

Spoiler:

bluffée (l'association simplicité-génie)

Moi aussi j'avais été emballée. Je trouve que la description psychologique (si je peux dire comme ça) du type est très finement menée.

Oui, comme quoi la finesse analytique est une affaire bien subjective, idem pour le style. Tout ceci me fait assez penser à mon ressenti vis-à-vis du roman de Peter Cameron, Un jour cette douleur te servira. Je reconnais qu'il y a quelque chose, mais ça ne me convainc pas.