Alain Resnais

Alain Resnais est un réalisateur français, également scénariste et monteur, né le 3 juin 1922 à Vannes (Morbihan).

Initialement voué à une carrière de comédien, il intègre la première promotion de l'IDHEC en montage et commence, à la fin des années 1940, à réaliser des courts métrages et moyens métrages documentaires qui marquent le public et la critique : Van Gogh, Guernica et surtout Nuit et brouillard, premier film de référence sur les camps de concentration.

Réalisateur d'Hiroshima mon amour (1959) et de L'Année dernière à Marienbad (1961), deux dates dans l'histoire du cinéma, Alain Resnais est rapidement considéré comme l'un des grands représentants du Nouveau cinéma (équivalent du Nouveau roman en littérature) et comme un des pères de la modernité cinématographique européenne, à l'instar de Roberto Rossellini, Ingmar Bergman et Michelangelo Antonioni dans sa manière de remettre en cause la grammaire du cinéma classique et de déconstuire la narration linéaire1,2,3.

Cinéaste expérimental, capable de se remettre en question à chaque nouvelle réalisation4, Alain Resnais est reconnu pour sa capacité à créer des formes inédites et à enrichir les codes de la représentation cinématographique par son frottement à d'autres arts : littérature, théâtre, musique, peinture ou encore bande dessinée5. Ses réalisations, du côté de l'artifice et de l'imaginaire, peuvent paraître déroutantes pour le grand public même si beaucoup ont rencontré le succès4.

On retrouve, le long de son œuvre, un grand nombre de thèmes tels l'histoire, la mémoire, l'engagement politique, l'intimité, la réalité de l'esprit, le rêve, le conditionnement socio-culturel, la mort, la mélancolie et bien sûr l'art6.

Pour les dix-huit longs métrages qui portent sa signature, Resnais a fait appel à des auteurs-scénaristes aussi renommés et différents que Marguerite Duras, Alain Robbe-Grillet, Jean Cayrol, Jorge Semprún, Jacques Sternberg, David Mercer, Jean Gruault, Jules Feiffer, Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui ou encore Jean-Michel Ribes1.

Fidèle dans le travail et amateur de l'esprit de troupe, Resnais a notamment sollicité à plusieurs reprises les comédiens Sabine Azéma, Pierre Arditi, André Dussolier et Lambert Wilson, les techniciens Jacques Saulnier, Éric Gautier et Hervé de Luze ou encore le compositeur Mark Snow6.

Réalisateur célébré par la profession, il a été plusieurs fois récompensé aux Césars et dans les festivals internationaux.

Citation :

Filmographie/Index (Cliquez sur les chiffres pour accéder directement aux pages)

Longs métrages
1959 : Hiroshima mon amour Page 4
1961 : L'Année dernière à Marienbad
1963 : Muriel, ou le Temps d'un retour
1966 : La guerre est finie
1968 : Je t'aime, je t'aime
1973 : L'An 01, de Jacques Doillon (tournage de la séquence américaine)
1974 : Stavisky
1977 : Providence
1980 : Mon oncle d'Amérique Page 3
1983 : La vie est un roman
1984 : L'Amour à mort
1986 : Mélo
1989 : I Want to Go Home (Je veux rentrer à la maison)
1993 : Smoking / No Smoking
1997 : On connaît la chanson
2003 : Pas sur la bouche
2006 : Cœurs
2009 : Les Herbes folles Pages 1, 2, 3
2012 : Vous n'avez encore rien vu Page 4
2013 : Aimer, boire et chanter (en tournage)

Courts et moyens métrages
1936 : L'Aventure de Guy
1946 : Schéma d'une identification
1946 : Ouvert pour cause d'inventaire
1947 : Visite à Oscar Dominguez
1947 : Visite à Lucien Coutaud
1947 : Visite à Hans Hartung
1947 : Visite à Félix Labisse
1947 : Visite à César Domela
1947 : Van Gogh
1947 : Portrait d'Henri Goetz
1947 : Le Lait Nestlé
1947 : Journée naturelle
1948 : Malfray
1948 : Les Jardins de Paris
1948 : Châteaux de France
1950 : Guernica
1950 : Gauguin
1952 : Pictura
1953 : Les statues meurent aussi
1956 : Nuit et Brouillard
1956 : Toute la mémoire du monde
1957 : Le Mystère de l'atelier quinze
1958 : Le Chant du styrène, documentaire
1967 : Loin du Vietnam
1968 : Cinétracts
1991 : Contre l'oubli
1992 : Gershwin

Citation :

arrêté le 08/04/2013 à la page 4

Les herbes folles


Alain Resnais nous a habitué depuis longtemps à ses dispostifs théâtraux qui créent un décalage et une distance avec les personnages qu'il observe comme un entomologiste en détournant les codes de narration habituels du cinéma. Ici on a l'impression qu'il a voulu faire une sorte de parodie de film "lynchien". Il a fait d'ailleurs appel pour la musique à Mark Frost (également déjà dans "Coeur") qui avait travaillé avec Lynch sur Twin Peaks et qui est surtout connu pour la musique de la série X Files.

La plupart des images en format scope donnent un sentiment de temps suspendu, d'onirisme, avec des ralentis, des répétitions, des effets de flottement... Et les personnages s'expriment au début en voix off sur ces images avec un son de studio d'enregistrement qui crée un effet de déréalisation.

L'aspect lynchien se retrouve aussi dans la narration qui superpose des références cinématographiques dans une sorte de mise en abîme. Les déclinaisons autour de l'aviation, les références aux histoires de possession et de "fantômes". Sabine Azéma est Marguerite Muir probablement pour faire référence au film Le fantôme et Mme Muir et à Marguerite dans Faust. La femme de Dussolier lit le dernier Philippe Roth "Exit Ghost". Une affiche de théâtre propose le spectacle: Qu'elle aille au diable Meryl Streep"...

Une interprétation:

Spoiler:

Le problème c'est que pour moi la sauce ne prend pas. Les images sont belles mais ne vibrent pas. La musique est laide (des synthés dignes d'un bontempi). Je me suis ennuyé et j'ai trouvé ça vain. Aucune émotion. Aucun plaisir malgré ces acteurs que j'aime beaucoup. Je n'ai pas eu envie de jouer avec Resnais. Tant pis!

Certains y trouveront peut-être beaucoup de liberté et de fantaisie. Moi je retourne à Lynch le vrai!

A noter que le film est adapté du roman de Christian Gailly:

Concernant Les herbes folles, je verrai ce soir. Et Resnais n'a pas attendu Lynch pour créer des univers troubles, énigmatiques, fascinants...voir Providence (1977).

traversay a écrit:

Concernant Les herbes folles, je verrai ce soir. Et Resnais n'a pas attendu Lynch pour créer des univers troubles, énigmatiques, fascinants...voir Providence (1977).

Lynch a fait Eraserhead la même année... C'est moins l'aspect trouble et énigmatique que tout le dispositif en lui-même qui est vraiment un décalque de Lynch dans "Les herbes folles" . Mais en beaucoup moins beau (malgré un superbe début) et en beaucoup moins mystérieux justement. C'est très artificiel même si j'admire beaucoup ce que fait Resnais depuis longtemps. Mais je ne rejette pas tout, il y a de bons moments et des trouvailles visuelles.

Dernier petit complément aux "Herbes Folles" qui finalement me poursuit plus que je ne l'aurais pensé... Les dernières images sont très belles et mystérieuses et il termine par un dernier plan qui semble complètement détaché de tout ce qu'on a vu jusque là. on y voit une jeune fille qui semble se réveiller dans la chambre d'une maison et qui demande à sa mère: "Quand je serai enceinte, je pourrai manger des croquettes?". Je ne peux pas m'empêcher d'y voir un clin d'oeil complice et en même temps amusé et ironique au cinéma de Lynch. Comme pour nous dire (et ce sera ma 2e interprétation possible du film) que tout ce qu'on a vu était le rêve de cette jeune fille qui a peut-être entendu un avion passer dans le ciel en nourissant son imaginaire fait de réminiscences cinématographiques.

A l'arrivée je me rends compte que tout ça devrait me donner le sentiment d'un formidable film et pourtant non... Probablement que cette relecture du cinéma "à la Lynch" avec cette distance ironique m'a trop rappelé qu'on était dans un exercice de style. Lynch au contraire donne corps et âme aux sombres rêves dans lesquels il nous immerge...

Et de la part de Resnais, hommage ou clin d'oeil ironique? probablement un peu des 2. J'aimerais savoir si un journaliste lui a posé la question...

Marko a écrit:

Les herbes folles

Nous y sommes allés à 4, de générations et de cultures différentes. Et nous sommes tous sortis heureux de la projection, même si nos points de vue différaient sur la question de savoir "il a voulu dire quoi, là" ? Moi, c'est son aspect ludique qui m'a enchanté. Et sa drôlerie, aussi. J'ai besoin de laisser décanter un peu et d'analyser. Un de mes amis, après la projection, ne cesseait de dire de façon admirative "quel con, ce Dussolier !". Chacun y a projeté un peu de lui-même, y voyant qui, un côté inquiétant, qui, un aspect fantasmé comme un mix improbable entre Providence et Smoking/No smoking. Une conclusion, qui m'est personnelle à propos de Resnais : On n'est pas sérieux quand on a 87 ans !

Content que tu apprécies. Il a le mérite de continuer à inventer et à s'amuser avec les formes.

Marko a écrit:

Les herbes folles


Alain Resnais nous a habitué depuis longtemps à ses dispostifs théâtraux qui créent un décalage et une distance avec les personnages qu'il observe comme un entomologiste en détournant les codes de narration habituels du cinéma. Ici on a l'impression qu'il a voulu faire une sorte de parodie de film "lynchien". [...]
La plupart des images en format scope donnent un sentiment de temps suspendu, d'onirisme, avec des ralentis, des répétitions, des effets de flottement... Et les personnages s'expriment au début en voix off sur ces images avec un son de studio d'enregistrement qui crée un effet de déréalisation.[...]Le problème c'est que pour moi la sauce ne prend pas. Les images sont belles mais ne vibrent pas. La musique est laide (des synthés dignes d'un bontempi). Je me suis ennuyé et j'ai trouvé ça vain. Aucune émotion. Aucun plaisir malgré ces acteurs que j'aime beaucoup. Je n'ai pas eu envie de jouer avec Resnais. Tant pis!

Je ne suis pas assez calée sur le cinéma de Lynch pour comparer (faudrait d'ailleurs que je me lance) mais je pense un peu comme toi Marko, surtout vers la fin...
Pourtant j'ai bien aimé le parti pris de cet homme qui, poussé par une pulsion incontrôlée, se met à fantasmer et va jusqu'à harceler cette inconnue dont il a retrouvé le portefeuille . L'imaginaire est capable de bien des choses et celui de Resnais s'en donne à coeur joie!

Il y a de bons moments, il y a toujours ce ton décalé et inventif et Dussolier est vraiment à la hauteur du personnage, entre bienséance et folie douce (Son retour à la maison avec les trois femmes est complètement surréaliste)
Mais je ne sais pourquoi, à un moment j'ai décroché et le temps m'a paru très long. C'est toujours délicat cette frontière entre le réel et le fantasmé, parfois ça tombe dans le too much et là c'est fichu. Impossible de remonter à bord.

Sans parler de la toute dernière scène avec la petite fille. Je ne vois pas l'intérêt mais tu vas sans doute m'expliquer...(par mp)
Par contre je lirai le livre de Christian Gally car certaines répliques (tirées du livre?) et l'intrigue m'ont tout de même bien plu!

Il y a une sorte d'énigme à résoudre mais cette fois je n'ai pas vraiment eu envie de creuser parce que j'ai l'impression que de toutes façons Resnais s'amuse sans vraiment prendre ce découpage "à la Lynch" au sérieux et que le film ne m'intéresse pas suffisamment pour me triturer les méninges

Je vois toutes les intentions de fantaisie, de liberté, de personnages qui sortent des sentiers battus, qui ont des herbes folles qui poussent dans la tête... Mais je suis complètement extérieur à tout ça. Trop artificiel. Le critique Aurélien Ferenczi résume bien cette impression sur la vidéo du cercle de canal +.

Les dernières images laisseraient à penser que le film est le rêve de cette gamine. Mais je n'ai pas le courage de le revoir pour y réfléchir!

L'image des herbes folles est bien trouvé certes, mais pour le reste cela tient tellement à un délire propre à Resnais que l'on reste sur le pas de la porte.

J'ai pensé à un rêve aussi (mais pas de la petite fille par contre ) ces images du sac qui voltige et qui reviennent. Et puis voler est un phénomène récurrent lors des rêves.
Mais comme tu dis, pas assez "dedans" pour chercher toutes les interprétations.

Tu m'as plutôt donné envie de me pencher sur Lynch en fait!

aériale a écrit:

J'ai pensé à un rêve aussi (mais pas de la petite fille par contre .

En fait je reste sur mon interprétation initiale dans mon premier post. A savoir que Dussolier est responsable du crash de l'avion et qu'il rêve de cet amour fantasmagorique où tout apparait décalé. Les pulsions homicides qu'il ressent seraient l'émergence de sa culpabilité. Il devait être passionné d'aviation (métaphore de "s'envoyer en l'air"?) et c'est pour ça qu'il y a toutes ces déclinaisons autour de ce thème. Il est bien le "fantôme" de Mme Muir puisqu'il est mort (son épouse aussi lit "Exit Ghost" de Roth). Les films de Lynch montrent souvent ce type de rêve post-mortem. La dernière image reste une pirouette ou un clin d'oeil. Rêve dans le rêve ? Réincarnation? Tout est possible et à mon avis non tranché. En tout cas cette jeune fille semble avoir elle-aussi des herbes vertes dans la tête (une vision pleine de fantaisie du monde) avec cette phrase amusante qu'elle prononce.

Marko a écrit:

En fait je reste sur mon interprétation initiale dans mon premier post. A savoir que Dussolier est responsable du crash de l'avion et qu'il rêve de cet amour fantasmagorique où tout apparait décalé. Les pulsions homicides qu'il ressent seraient l'émergence de sa culpabilité. Il devait être passionné d'aviation (métaphore de "s'envoyer en l'air"?) et c'est pour ça qu'il y a toutes ces déclinaisons autour de ce thème. Il est bien le "fantôme" de Mme Muir puisqu'il est mort (son épouse aussi lit "Exit Ghost" de Roth). Les films de Lynch montrent souvent ce type de rêve post-mortem. La dernière image reste une pirouette ou un clin d'oeil. Rêve dans le rêve ? Réincarnation? Tout est possible et à mon avis non tranché. En tout cas cette jeune fille semble avoir elle-aussi des herbes vertes dans la tête (une vision pleine de fantaisie du monde) avec cette phrase amusante qu'elle prononce

Je ne le vois pas tout à fait comme ça Marko. En fait tu analyses très bien tout ça du point de vue du psychanaliste mais je n'ai pas l'impression qu'il y ait eu réellement accident d'avion (le coup de la braguette est tellement décalé ) ni qu'ils aient pu se retrouver (la scène du retour chez lui avec les trois bonnes femmes est énorme ) Cela tient tellement de la farce que ça me parait de l'ordre du fantasme plutôt.
Il me semble qu'il rêve à partir du moment où ils se retrouvent au café et qui'il revoit la scène en marchant à l'envers...

En fait seul Resnais doit le savoir et toutes les visions sont permises ici!

Je suis restée "à la porte"…Ce film loufoque m’a ennuyée prodigieusement…Je ne sais même pas s’il m’a fait sourire…Oui…parfois…certainement…je n’en pas si sûre…
En plus, je me sens très stupide de n'avoir rien compris...

coline a écrit:

Je suis restée "à la porte"…Ce film loufoque m’a ennuyée prodigieusement…Je ne sais même pas s’il m’a fait sourire…Oui…parfois…certainement…je n’en pas si sûre…
En plus, je me sens très stupide de n'avoir rien compris...

T'inquiète Coline, Il n'y a pas grand chose à comprendre!
En fait chacun voit ce qu'il veut, la logique n'a pas cours ici...Resnais s'est fait un petit plaisir fantasmé.

Ca distrait un moment mais on a du mal à embarquer complètement, c'est evident

J'ai bien aimé , par contre la dernière réplique m'a énervé , ça fait vraiment trop "phrase-de-film-pour-bobo"...!
Mais en fait j'ai surtout apprécié le jeu de Dussolier; Azéma était bien aussi mais peut-être moins "en forme" que d'habitude.

aériale a écrit:

coline a écrit:

Je suis restée "à la porte"…Ce film loufoque m’a ennuyée prodigieusement…Je ne sais même pas s’il m’a fait sourire…Oui…parfois…certainement…je n’en pas si sûre…
En plus, je me sens très stupide de n'avoir rien compris...

T'inquiète Coline, Il n'y a pas grand chose à comprendre!
En fait chacun voit ce qu'il veut, la logique n'a pas cours ici...Resnais s'est fait un petit plaisir fantasmé.

Ca distrait un moment mais on a du mal à embarquer complètement, c'est evident

Mais il ne m'a même pas distraite!... Il m'a ennuyée!...