Chroniques de la vie quotidienne

Marie a écrit:

Bonjour la Chine !!

Et je te dis bonjour le Luxembourg: pour montrer tout à fait le contraire de cette réalité que ces travailleurs doivent faire face: chez nous, tout comme le 1er mai, la journée de l'Ascension est aussi un jour férié. Exceptionnellement cette année on a ces deux journées sur une même date - on pourrait dire - bon, ils peuvent déjà être content d'avoir leur jour férié - soit 1er mai, soit Ascension... mais vous ne connaissez pas le Luxembourg - ici, rien ne se perd - donc - on aura bien notre jour férié - p.ex. dans ma firme on fait le pont demain et on ne doit pas prendre un jour de congé, dans d'autres firmes qui vont travailler demain, les employés auront un jour de congé en plus..
Naturellement je ne me plains pas – mais point de vue égalité dans notre société ???

Chroniques nimoises

Il faisait beau en avril cette année-là, et j'avais proposé à Adalberto,
l'étudiant brésilien que j'avais connu à la Bibliothèque, d'aller passer
quelques jours à Nimes.
Histoire de lui faire visiter la ville, et pour moi, l'occasion de revoir mon ami d'enfance...
Le premier jour, on a fait le tour de ville à pied par les boulevards
circulaires en regardant au passage la Maison Carrée, les Arènes, la Porte Auguste. Un figuier poussait au milieu des pierres, au pied d'Auguste, je m'en souviens.
Et puis aussi ces lieux de mémoire de l'enfance et de l'adolescence :
le lycée Alphonse Daudet, les librairies Cévennes et Tessier, les cafés,
le Prisu, les cinémas, les églises Ste Pérpétue et les Carmes, l'Esplanade...
Le lendemain, on est allés au Jardin de la Fontaine, un endroit familier,
accueillant, très beau et complètement hors du temps et de l'espace.
En plus, comme il est entouré d'eau, on a l'impression d'accoster sur une
ile.
Dans les villes, j'ai toujours aprécié les jardins publics, mais j'ai quand meme une préférence pour celui de Nimes.
On est montés jusqu'à la Tour Magne par des chemins labyrinthiques,
passant de la lumière éblouissante des jardins à la française à la pénombre
des pins, des micocouliers et des lauriers tins.

Au retour, j'ai pensé au bouquiniste que je fréquentais longtemps
auparavant, persuadé qu'il avait disparu.
... Surprise, la boutique était toujours là et elle était meme ouverte.
Nous sommes entrés, et là, autre surprise, au lieu du personnage pompeux
que j'avais connu, se tenait une étrange créature...
Une jeune femme brune et mince, vétue de noir. Très maquillée et
absolument couverte de bijoux de la tete aux pieds. Ongles teints. Chaussures à talons hauts.

Etrange apparition au milieux des vieux bouquins, encore plus vieux et poussiereux.
Surmontant ma surprise, je m'approchai et lui demandais des nouvelles du bouquiniste.
Elle ne savait rien. Elle meme ne faisait que remplacer l'actuel propriétaire.

Quand elle a appris qu'Adalberto était brésilien, elle s' est enthousiasmée,


et elle a pris des poses langoureuses en évoquant la samba, le Carnaval de Rio...
Tout comme son apparence avait quelque chose de caricatural, ses propos n'étaient que clichés.
Mais l'envie de rire qui commençait à nous gagner Adalberto et moi, a
fait vite place à la honte, en découvrant que nous avions affaire à une
femme dont la gentillesse candide était on ne peut plus touchante et authentique.
Tout à coup, nous nous sentions comme deux renards qu'une poule aurait pris !!
Une heure plus tard, nous bavardions amicalement, et Adalberto obtint
de la photographier avant de partir.
Le soir, nous bavardions longuement, et je ne suis pas sur qu'Adalberto n'ait eu un petit béguin !

Cette photo, je l'ai retrouvée, et elle confirme mes impresssions. Et comme
la mémoire nous joue des tours, elle est au moins la preuve que je n'ai pas revé !!!

Je viens de voir un film sur Arte. Whisky, un film co produit par l'Uruguay,
l'Argentine et l'Allemagne.
Si vous ne l'avez pas vu, tant pis, mais c'est un peu dommage...
Je ne vous le raconterai pas non plus. Je dirai simplement que c'est une histoire
triste et banale, avec des personnages déglingués, dans un pays au bord
de la mer, donc l'Argentine, je suppose...
Mais le décor est tellement miteux, vieillot, qu'on se croirait tout à fait
dans un film de Jarmush, en particulier Stranger than paradise, où la Floride
était ce qu'elle est sans doute : l'envers du paradis.
Ce film est illuminé par une petite femme, pas très jeune, ni très belle,
mais animée d'une sereine bonté.
Ce film est étrange et foutraque. Mais étrange bien!
Vous comprendrez pourquoi j'ai eu envie d'en parler ici et nulle part ailleurs...

Je vais regarder, on a certains programmes d'Arte une semaine plus tard.
J'ai bien un enregistreur très perfectionné, mais hélas trop sans doute pour moi...


http://fr.wikipedia.org/wiki/Whisky_(film)

je vais surveiller si le film repasse.

merci Bix

L'ile d'Arz. Chronique insulaire.

J'ai visité l'ile d'Arz, en Bretagne, dans les années 8O.

Une ile, c'est beaucoup dire... Un ilot... Une motte de terre arrachée à la
cote... Un confetti vert posé sur les eaux du Golfe du Morbihan. 10 km 2, en tout et pour tout.
Et pourtant nous n'avons pas tout visité. Ni les marais salants, ni les étangs, ni l'église du XIIe...
Les maisons les plus anciennes sont des maisons de poupée. On est presque surpris ensuite de constater que les hommes, les animaux ou les arbres ont une taille normale.
Détail : les portes des maisons étaient ouvertes ou entrouvertes et on
nous a expliqué que tous les habitants se connaissaient et qu'ils n'avaient ni craintes ni méfiance.
C'était avant l'ère du soupçon, de la méfiance et du sécuritaire, et les
choses ont du changer depuis.

En nous promenant, nous avons vu des enfants jouer sur un terrain couvert de fleurs. Une dame s'est approchée et nous a expliqué que
c'était le cimetière marin, que c'était leur terrain de jeux habituel et
que ça les familiarisait avec la mort.
Elle nous a appris aussi que la flore étonnante de l'ile -mimosas, thym, romarin-
que je croyais pousser seulement au bord de la Méditerranée, était
favorisée par un micro climat qui protégeait le Golfe du Morbihan.
En la quittant, elle nous a dit d'un ton affirmatif : vous resterez ici,
comme je l'ai fait moi-meme, il y a 2O ans...

Plus loin, nous eumes le spectacle surprenant et anachronique, d'un
paysan qui labourait son champ avec un grand cheval du genre Percheron.
Tandis que des mouettes ou des goelands volaient autour de lui.

En retournant sur le continent, comme disaient les insulaires, à bord du
petit bateau qui nous avait emmenés, un détail me frappa : la grande discrétion observée par les hommes-des bretons- qui venaient de travailler sur un chantier dans l'ile.
Méditerranéen moi-meme, je me suis souvent senti proche de ces gens.

Ahhh...je viens un peu respirer l'air sauvage et plein d'embruns de la Bretagne chère à Bix, par ce que sur l'autre fil de K c'est pas joyeux...(son histoire de jeu vidéo dernier cri me file des angoisses )

Merci pour ce retour aux sources
(et je vais me renseigner sur ce film Whisky qui parle de l'Argentine...)

bix229 a écrit:

Pour le reste, il y avait des livres absolument partout. Ce qui empechait
absolument de faire une évaluation précise des proportions exactes et de
l'agencement de la boutique.
Comme je te le disais, c'était un capharnaum inimaginable, qui t'aurais probablement
mise en extase et dont tu aurais fait des photos inoubliables...

Es-tu bien sûr que ton bouquiniste n’avait pas un frère qui s’est implanté à Saint Malo ??
En tout cas – le lieu est tout à fait comme celui que tu décris de Nîmes!
Je n’ai pas osé prendre des photos à l’intérieur par peur que le Monsieur me le prend mal – son « désordre » est phénoménale

Non non, Kenavo, dans cette boutique, tout était vieux, poussiéreux et obscur comme dans une grotte !

Dans la photo que j'ai gardée, malheureusement, on voit surtout la demoiselle remplaçante...

bix229 a écrit:

Non non, Kenavo, dans cette boutique, tout était vieux, poussiéreux et obscur comme dans une grotte !

Bon.. la prochaine fois je vais demander si je peux faire des photos à l'intérieur.. parce que cette 'grotte de livres' n'est pas loin de ta description

Chronique du temps passé.

Parfois le passé, le notre ou celui des autres, nous rejoint, et nous explose
littéralement au visage...


Enfant, j'ai appris qu'il s'était passé des choses moches et meme carrément sordides dans notre pays, pendant la dernière guerre et la
période noire dite de "l'Occupation".
Y compris dans ma ville et dans mon quartier.
J'ai su par exemple que des habitants de mon quartier -un couple- avaient dénonçé
leurs voisins à la Gestapo, sous prétexte qu'ils étaient communistes -et peut etre juifs-, et qu'ils avaient été exécutés.
Et puis, ils s'étaient emparés de leurs pauvres biens.
Mon père connaissait les uns et les autres. Et il avait beaucoup de sympathie pour ces malheureux, dont il appréciait le courage et l'honneteté, meme s'il ne partageait pas les opinions politiques. Il méprisait par contre profondément les délateurs.

Le temps passait. Peu à peu, les traces douloureuses de cette
époque s'effaçaient. Remplacées par l'oubli ou l'indifférence.
Du moins en apparence.

Les délateurs reprenaient du poil de la bète, n'ayant pas été jugés pour
leurs actes, elle surtout, qui affichait une morgue plutot indécente.
Lui se montrait plus discret...

Un soir, lontemps après ces évenements, j'allais prendre le train pour
rejoindre mon travail. Je passais devant leur maison lorsque j'entendis
des hurlements épouvantables qui en sortaient.
J'étais pressé par le temps et je poursuivis mon chemin.
Mais la semaine suivante, j'appris par mes parents que le délateur
s'était pendu.
Etait il rongé par le remords et la mauvaise conscience, submergé par
des images affreuses ?
J'ose presque esperer que oui.

Je suis en train de lire un autre livre de Hella S. Haasse – Viser les cygnes

Citation :

J’ai parfois l’impression de retrouver ma grand-mère, quand je vois défiler, derrière la vitre d’un train, des paysages nouveaux, des villes étrangères ; elle est présente, d’une manière indéfinissable, dans la perspective d’une rue bordée de maisons du XIXe siècle, à Amsterdam, Bruxelles, ou Paris. Je vois des fenêtres sombres, poussiéreuses, des volets à la peinture écaillée, des balcons de fer forgé aux volutes baroques, et soudain, c’est forgé aux volutes baroques, et soudain, c’est comme si je regardais par ses yeux, il y a bien longtemps, au moment où, au bord d’un trottoir identique, au coin d’une rue semblable, elle attendait de pouvoir traverser, relevant la main gauche un pan de sa jupe longue, appuyée sur son parapluie ; une jeune femme seule, se dirigeant vers une pension de famille ou vers une loge d’artiste dans un théâtre.

Alors j’ai dû penser à ma grand-mère.
Jusqu’à sa mort (j’avais 9 ans à ce moment) je passais beaucoup de temps chez elle. Mais malheureusement, étant si jeune, les souvenirs sont souvent seulement des instants, des ‘flashs’ qui apparaissent.. mais jamais trop pour me donner un ‘ensemble’.


Deux de ces 'moments' – elle faisait le meilleur gâteau de riz – et toute la famille était trop convaincu qu’elle allait le faire jusqu’à l’éternité que personne n’a pris le temps pour noter la recette – et donc – à toutes les réunions de famille il y a au moins un qui commence à parler de ce bon gâteau et tout le monde se souvient.. mais il est ‘perdu’ à jamais..

Et je me rappelle des jeux pour lesquels elle se prenait le temps de jouer avec moi. Dans le temps je le trouvais bizarre qu’elle perdait presque toujours, tandis que je me disais qu’elle était quand même plus grande et forte que moi.. cela m’a pris quelques années à réaliser que les grand-mères donnent normalement cet avantage à leurs petits-enfants

J'espérais que la Journée du patrimoine me permettrait d'alimenter ce fil
qui s'étiole.
Mais j'ai fait chou blanc. Les chateaux que je comptais visiter étaient
fermés et en bien mauvais état, notamment à Le Vaux, un énorme chateau médiéval, réaménagé à la Renaissance.
Les fissures lésardent les murs et l'ensemble menace ruine.
Bref, cette journée du patrimoine fut un non évenement.
Pourtant, il y a vraiment des choses à voir, notamment à Toulouse avec
les cloitres et les musées des Augustins et des Jacobins qui récèlent
des trésors picturaux et architecturaux remarquables.

Chronique des autres

"Chacun de nous a des souvenirs secrets et merveilleux qui remontent à son enfance, à sa jeunesse ou meme à son age adulte.
Ce sont des bribes du passé qui nous sont particulièreemnt chères : une
journée d'été, un bord de mer, les paroles ou le silence d'une personne aimée.
Dans la vie réelle, il n'en reste rien. Les protagonistes, jeunes ou vieux,
sont morts ou sont devenus méconnaissables. La maison a brulé, le jardin
a été détruit, le lieu a changé trois fois de nom, la végétation l'a envahi
ou bien on y a creusé un lac artificiel.
Nous sommes seuls avec nos souvenirs comme dans un reve."

Nina BERBEROVA - C'est moi qui souligne.

bix229 a écrit:

Nina BERBEROVA - C'est moi qui souligne.

c'est bien de l'avoir sur ce fil..