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| Bruno Dumont | |
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Auteur | Message |
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coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Bruno Dumont Lun 15 Avr 2013 - 21:30 | |
| Je partage en tous points ce que tu dis si bien Queenie dans ce commentaire élaboré. | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Bruno Dumont Mar 16 Avr 2013 - 1:05 | |
| Très chouette commentaire Queenie. Pour moi l'émotion est constante dans l'effroi, la solitude, l'enfermement, ce mélange de tristesse infinie et de drôlerie involontaire que provoque la vision de ces personnages en marge de la societe. La façon dont Juliette Binoche observe, rejette puis devient solidaire de ces malades est déchirante. Le spectateur effectue le même parcours. Ces "fous" nous dérangent, nous font peur ou nous font sourire puis on finit par toucher à leur humanité qui nous les rend si proches. Cette femme qui court la prévenir de l'arrivée de son frère c'est probablement scénarisé mais c'est aussi un reflet de cette générosité désintéressée, de cette solidarité qui existe entre malades et entre êtres humains tout court face à la souffrance. Toute l'émotion du film, derrière la froideur du cadre implacable, passe par ces visages que Bruno Dumont nous donne à voir admirablement. C'est une œuvre d'art ultra maitrisee mais c'est aussi un film qui déborde d'humanité. Plus que dans n'importe quelle fiction qui aurait reconstitué l'univers psychiatrique et la folie (ou le handicap plutôt d'ailleurs ici).
Coline dit que les malades ne savent pas ce que la caméra leur prend. C'est probablement vrai (en partie) mais ce qu'elle prend est tellement touchant, vrai et humain que la question du voyeurisme ne se pose plus pour moi. | |
| | | Queenie ...
Messages : 22891 Inscription le : 02/02/2007 Age : 44 Localisation : Un peu plus loin.
| Sujet: Re: Bruno Dumont Mar 16 Avr 2013 - 10:29 | |
| Et puis la caméra ne prend que ce qu'il serait donner de voir si nous étions présents. Dumont était présent, l'équipe du film (je me suis demandée s'ils étaient nombreux justement, pour ne pas "effrayer" ou si c'était un comité restreint pour favoriser la confiance et l'intimité), du coup le spectateur n'est pas plus voyeur que ceux qui étaient là. Et le regard transmis est en effet tellement plein de douceur et d'humanité qu'il ne m'a pas dérangée.
Pour le parcours émotionnel prit par le spectateur, je suis d'accord aussi : nous suivons le cheminement de Camille Claudel. Dans l'appréhension, la tendresse, l'étouffement. Je souligne juste que ces émotions nous arrivent par bribes, en filigrane. Le cadre très maîtrisé nous laisse légèrement en distance, ce qui fait qu'on admire l’œuvre avant d'y être impliqué. Mais ce n'est pas si mal, jouer sur l'empathie, l'émotion brute et violente, auraient été très simple. Et moins beau au final. | |
| | | Arabella Sphinge incisive
Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Bruno Dumont Ven 19 Avr 2013 - 20:51 | |
| Je me sens assez proche des impressions de Queenie et de Traversay. Une beauté formelle sidérante, les images traités comme des tableaux, chaque plan pourrait être encadré. Une utilisation des paysages stupéfiante. Et dans toute cette splendeur visuelle, l'expression d'une souffrance incommensurable. Celle de l'enfermement, de la solitude, de la maladie mentale. Portée par une actrice au sommet de son art. Une grande subtilité aussi dans la présentation du personnage de Camille Claudel, entre lucidité, sensibilité et maladie. L'arrivée de Paul Claudel enrichi aussi le point de vue, quelque part il est aussi fragile que sa soeur, avec ce délire mystique, qui est une sorte de refus de la réalité, mais il arrive à donner à cela une forme socialement acceptable, alors que son discours semble par moment, surtout à notre époque, presque aussi délirant que celui de sa soeur lorsqu'elle parle des persécutions dont elle se croit victime.
Mais en même temps, c'est un film où je suis resté un peu à l'extérieur. On admire, mais on reste à l'extérieur. Il manque un petit quelque chose pour être à l'intérieur. Mais cette distance est peut être voulue par le réalisateur, le spectateur n'est que le spectateur, il ne peut véritablement entrer comme participant dans ce lieu d'isolement et de souffrance. La distance est réelle et infranchissable. Et le refus d'une émotion trop fusionnelle, est comme le refus d'une facilité. Mais crée une sorte de petite frustration. Mais ce n'est peut être pas plus mal. | |
| | | Queenie ...
Messages : 22891 Inscription le : 02/02/2007 Age : 44 Localisation : Un peu plus loin.
| Sujet: Re: Bruno Dumont Sam 20 Avr 2013 - 10:12 | |
| - Citation :
- Et le refus d'une émotion trop fusionnelle, est comme le refus d'une facilité. Mais crée une sorte de petite frustration. Mais ce n'est peut être pas plus mal.
Exactement ! | |
| | | colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
| Sujet: Re: Bruno Dumont Jeu 13 Juin 2013 - 14:17 | |
| Camille Claudel 1915 (2013) de Bruno Dumont
Camille Claudel disparaît derrière Juliette Binoche. Bien que le générique nous annonce en entrée que nous allons découvrir la vie de la sculptrice lors de sa première année d’internement dans un centre médical du Vaucluse, il sera difficile d’associer l’actrice qui nous est présentée au personnage qu’elle doit jouer.
Plusieurs raisons peuvent expliquer cela, et tout d’abord le choix de Bruno Dumont de ne pas faire intervenir d’acteurs pour figurer les patients du centre médical mais des retardés mentaux bien réels. Ceux-ci deviennent dès lors l’objet d’une fascination mal contrôlée. Bienvenue au pays des monstres : la caméra s’attarde longuement sur les figures et les gestes de ces personnes, semblant vouloir nous convaincre de leur étrangeté. Ce ne sont pas les regards las et dégoûtés que leur envoie Juliette Binoche (Camille Claudel ?) qui viendront atténuer cette sensation. A ce stade du film, Camille Claudel 1915 ressemble à un Elephant man au premier degré, non pas considéré du point de vue de l’homme-éléphant mais du point de vue du Docteur Treeves et de son public.
Entourée de retardés mentaux qui ne simulent pas, Juliette Binoche se démène pour avoir l’air naturelle dans le rôle d’une Camille Claudel qui serait « seulement » un brin paranoïaque. La persuasion fait presque son effet lorsque Juliette Binoche se contente de marquer sa méfiance par des gestes lents, parfois saccadés, et des regards longs et pesants, mais sitôt que la joie ou la tristesse se manifeste, l’illusion cesse immédiatement. La caméra s’attarde trop longuement sur ces humeurs, comme s’il s’agissait de nous convaincre à long terme, par la seule force de l’hypnose. Bruno Dumont ne cherche pas à faire comprendre le personnage de Camille Claudel et semble croire qu’il suffit de montrer –le plus lourdement étant le mieux. Mais le procédé ne fonctionne pas. Les crises de désespoir du personnage deviennent les pleurnicheries agaçantes d’une actrice qui ne sait plus comment faire pour traduire la détresse ; ses monologues ne sont plus le fruit d’une inspiration créatrice mais l’excentricité baroque d’un réalisateur qui a mal su traduire l’imprévisibilité de son personnage névrosé. Pour un peu, voilà qui risquerait de nous désintéresser complètement de Camille Claudel. Heureusement, comme Bruno Dumont ne parvient pas un instant à dépasser l’illusion cinématographique, on se souvient qu’il ne s’agit que d’un film et que la vraie Camille Claudel mérite certainement plus d’intérêt qu’une Juliette Binoche centrée sur ses performances plus ou moins réussies d’actrice. | |
| | | colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
| Sujet: Re: Bruno Dumont Jeu 13 Juin 2013 - 14:30 | |
| - coline a écrit:
- Camille Claudel 1914
Mais j’ai souffert ! Je me suis sentie mal à l’aise… Et voici pourquoi: Je me demandais sans cesse de quel droit on pouvait voler l’image des malades qui entourent Juliette Binoche dans ce lieu. Ils ne font pas que passer, ils sont filmés longuement, en prise à des situations difficiles de leur quotidien. On se sent voyeurs. J’imagine que leurs familles ont été d’accord. Mais eux ils ne sont pas en mesure de savoir ce que le réalisateur leur prend. La scène de la répétition de théâtre par exemple m’a paru cruelle.
Je partage ton point de vue. Filmer ces malades ne relève plus seulement de la volonté de filmer à la manière d'un documentaire... pourquoi tous ces gros plans ? et ces regards que leur lance Juliette Binoche ? (je n'arrive vraiment pas à l'imaginer en Camille Claudel). Ils servent le film, mais le film n'a aucun intérêt à les servir personnellement. On peut le faire croire, mais j'en doute. - Marko a écrit:
- Je n'y vois aucun voyeurisme justement parce que le réalisateur met sur le même plan une comédienne renommée des non professionnels et des malades dans une même quête de vérité et d'humanité.
Et c'est justement parce qu'il veut les mettre sur le même plan que j'ai trouvé cet arrangement inopportun. M'enfin, à vous lire, je pense que je suis vraiment passée à côté de quelque chose et que je n'ai rien compris à la démarche de Dumont... | |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Bruno Dumont Jeu 13 Juin 2013 - 16:14 | |
| Je te rejoins complètement Coli à propos de la captation de ces images de malades. | |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Bruno Dumont Jeu 13 Juin 2013 - 16:22 | |
| - Queenie a écrit:
- Et puis la caméra ne prend que ce qu'il serait donner de voir si nous étions présents. Dumont était présent, l'équipe du film (je me suis demandée s'ils étaient nombreux justement, pour ne pas "effrayer" ou si c'était un comité restreint pour favoriser la confiance et l'intimité), du coup le spectateur n'est pas plus voyeur que ceux qui étaient là. Et le regard transmis est en effet tellement plein de douceur et d'humanité qu'il ne m'a pas dérangée.
C'est complètement différent d'assister incidemment à une scène de la vie et de filmer volontairement des scènes de la vie pour les projeter sur grand écran devant des milliers de spectateurs. L'acteur, lui, sait, et moyennant finances, il assume de passer par là. Mais ces malades-là ne savaient pas ce qu'on leur prenait. L'inconscience qu'ils ont de ce que verra le spectateur, c'est cela qui m'a mise mal à l'aise. J'ai eu le sentiment dérangeant de devoir les regarder longuement (trop longuement) à leur insu. | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Bruno Dumont Jeu 13 Juin 2013 - 17:06 | |
| Peut-être que le DVD proposera un supplément éclairant sur la manière dont le film a été réalisé. Tout ce que j'ai trouvé est le fait que Dumont a eu l'autorisation du psychiatre (qui joue son propre rôle) de filmer le lieu et les pensionnaires. | |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Bruno Dumont Jeu 13 Juin 2013 - 22:47 | |
| - Marko a écrit:
- Peut-être que le DVD proposera un supplément éclairant sur la manière dont le film a été réalisé. Tout ce que j'ai trouvé est le fait que Dumont a eu l'autorisation du psychiatre (qui joue son propre rôle) de filmer le lieu et les pensionnaires.
Je sais que tu ne seras pas d'accord avec moi mais...l'autorisation du psychiatre, OK...l'autorisation des familles, OK...Mais les malades! Ce sont eux qu'on filme!... et eux ne savent pas ce qu'on leur prend!...C'est cela qui me gêne comme spectatrice, même si je ne doute pas qu'il y ait eu de la part de l'équipe qui a réalisé le film la plus grande des délicatesses et le plus grand respect. | |
| | | colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
| Sujet: Re: Bruno Dumont Dim 16 Juin 2013 - 13:09 | |
| - coline a écrit:
- Marko a écrit:
- Peut-être que le DVD proposera un supplément éclairant sur la manière dont le film a été réalisé. Tout ce que j'ai trouvé est le fait que Dumont a eu l'autorisation du psychiatre (qui joue son propre rôle) de filmer le lieu et les pensionnaires.
Je sais que tu ne seras pas d'accord avec moi mais...l'autorisation du psychiatre, OK...l'autorisation des familles, OK...Mais les malades! Ce sont eux qu'on filme!... et eux ne savent pas ce qu'on leur prend!...C'est cela qui me gêne comme spectatrice, même si je ne doute pas qu'il y ait eu de la part de l'équipe qui a réalisé le film la plus grande des délicatesses et le plus grand respect. Oui, et surtout, pourquoi nous les présente-t-on de la sorte ? Pourquoi ces plans prolongés et insistants ? pour ne pas dire tout simplement lourd... c'est avilissant pour ces malades, mais aussi pour le spectateur ! on nous prend pour qui... ? | |
| | | églantine Zen littéraire
Messages : 6498 Inscription le : 15/01/2013 Age : 59 Localisation : Peu importe
| Sujet: Re: Bruno Dumont Lun 27 Jan 2014 - 12:20 | |
| - coline a écrit:
- Camille Claudel 1914
Mais j’ai souffert ! Je me suis sentie mal à l’aise…
Oui , on souffre tout au long du film , de façon aigue et profonde . Je crois qu'à aucun moment je ne me suis posée la question du "voyeurisme" : ces malades percent l'écran par l'humanité que Dumont leur rend par son art : la scène de la répétition de théâtre est sublime , on se sent tellement proche ........c'est eux ....ça pourrait être nous ....à travers le regard de Camille Claudel , on oscille constamment entre la volonté de s'abstraire de cette réalité difficilement soutenable et l'envie d'embrasser cette souffrance pour ne faire qu'un , abolissant cette frontière entre les êtres . Un film qui m'a pris "aux tripes" : la folie peut être sublimée , c'est ce que fait Dumont avec une maîtrise "scotchante" ! Je suis encore sous le coup de l'émotion et de l'admiration pour cette oeuvre dérangeante pour certains , magistrale pour moi essentiellement dans la grande générosité que j'ai ressentie de la part de Dumont . Du grand art ! | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Bruno Dumont Jeu 22 Mai 2014 - 17:04 | |
| P'tit Quinquin, la série de Dumont présentée à Cannes a l'air extra. Bientôt sur Arte... | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Bruno Dumont Jeu 18 Sep 2014 - 21:06 | |
| Horreur j'ai oublié P´tit Quinquin Heureusement il sort en dvd le 7 octobre. | |
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| Sujet: Re: Bruno Dumont | |
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| | | | Bruno Dumont | |
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