Juste la fin du monde .C'était osé et mettre la barre haute de porter à l'écran une pièce de théâtre de Jean-Luc Lagarce . Mais on connait l'audace de l'artiste ...."Même pas peur "pour
Xavier Dolan avec sa fougue juvénile et son approche libre de toute contrainte et de quelque tradition cinématographique .
Il filme avec ses tripes une fois de plus . Les convenances , il s'en balance .
Et c'est bien ainsi .
L'histoire ?
Louis rentre chez lui , dans "sa tribu" après 12 ans d'absence pour annoncer aux siens sa mort prochaine .
Et nous voilà plongés dans ses retrouvailles et complice de Louis face à cette famille cabossée . Ambiance théâtrale , Chacun cherche dans son registre personnel une parade pour accueillir le "traitre" , celui qui n'a jamais su jouer sur le registre familial et s'est envolé dans des contrées inconnues , loin de l'étouffante famille" je t'aime je te hais ". On n'a jamais bien su communiquer dans cette famille "tuyau de poêle " , on n'a surtout pas appris les codes garde-fous qui permettent de garder un certain équilibre ....Alors on crie , on "hystérise" , on croit se cacher derrière de pathétiques artifices primaires comme la mère et son maquillage premier prix ....Visiblement elle n'a pas appris à doser . Mais elle fume des cigarettes de "bourgeoise" et elle sait créer de petits repas genre "nouvelle gastronomie chic" dans sa petite cuisine de pavillon . Le frère ? Vincent Cassel excelle dans le rôle écorché vif incapable d'analyse et de recul .
On réagit de façon tripale dans cette famille . L'instinct de survie et de protection animale est le seul filtre . Alors bien sûr que l'inconscient collectif , clanique a compris le caractère d'urgence dans ce retour du vilain petit canard (ou du cygne) et chacun se défend comme il peut face au drame imminent qu'il sent tel l'animal qui hurle à la mort . Et dans des situations aussi tragiques leurs outils de préservations peuvent paraitre primaires et outranciers .
Et les rancoeurs se réveillent ....Mais peut-être pas autant qu'ils veuillent bien nous le faire croire , ça donne une contenance , on se positionne sur des registres comportementaux qui nous rassurent souvent .
Seule la belle-soeur échappe à cette lourdeur . Elle n'en est pas moins la plus maladroite car peut-être la seule à avoir "conscientiser" le drame à venir .
.....
Si surjeu il ya , c'est pour mieux enraciner chaque personnage dans ses douleurs et dans son incapacité à appréhender le réel . Chaque acteur joue avec une rare finesse sur ce registre un peu particulier du théâtre filmé et ça peut destabiliser car les repères sont différents par rapports au cinéma habituel . Peut-être est-ce cela que les cinéphiles ont boudé dans ce dernier
Xavier Dolan.
Non exempt de quelques maladresses certes ( à l'instar des flash-backs inutiles et lourdingues ou la bande-sonore et la fin bien sûr franchement d'un goût douteux ) , "Juste la fin du monde " témoigne une fois de plus d'un talent "hors-norme" , de l'affect à l'état brut , sans compromis .
Xavier Dolan avance dangereusement mais brillamment sur des sentiers non balisés , libre, extraverti et généreux .
Et j'ai pleuré une bonne partie du film ( Pendant que d'autres riaient ), longtemps après aussi .
Et bien entendu .....Il ne me reste plus qu'à lire la pièce de Jean_Luc Lagarce . Déjà réservée en BDP d'ailleurs .