Lecture en commun - Peter Stamm : Sept ans

j'ai continué ma lecture et j'ai du mal à poser le livre.. c'est prenant, bien que cet Alex me donne un peu la peine.. mais qu'est-ce qu'il fout? il n'a pas d'énergie pour se trouver un travail valable, pour se décider pour l'une ou l'autre femme, je pense surtout à cette scène dans son nouveau appartement et que lui et Sonja se regardent dans le miroir et le moment qu'ils s'embrassent il pense au couple qui s'embrasse aussi dans le miroir.. il est le spectateur de sa vie.. mais il ne la vie pas, ou quoi?

l'écriture est bien, l'histoire coule et j'ai envie de le terminer à la minute

Alors, voilà, j'ai repris là : "Les jours que nous avons passés à Marseille ont sans doute été les plus heureux de notre relation."
Et j'ai vogué jusqu'à la page 155.
Eh, kena, c'est Munich, moi c'est Marseille. 1 an et demi passé là bas, il y a plus de 20 ans déjà. Souvenirs mitigés. Plus rebelle, la vie.

Revenons à nos moutons. De plus en plus, la question se pose : mais quelle est cette relation qu'entretient Alexander avec Iwona ? Animale, sexuelle, obsédante. Il est souvent question de dépendance comme si notre homme était en état d'addiction.

Moi, je vois la jeune polonaise comme antidote à la perfection douloureuse de sa femme Sonia, intouchable, inacessible, supérieure à Alexander, surtout sur le plan intellectuel et de la volonté.

Ce dernier a t-il besoin de s'avilir avec sa relation coupable avec Iwona ? Pourquoi pas de mettre en péril son couple ? Parce qu'il n'est pas à la hauteur de Sonia, de toutes manières.

Stamm sème des indices, il écrit très dense (je ne suis pas d'accord avec vous, ça ne se lit pas si vite que cela. Il y a des tonnes de détails qui n'ont l'air de rien et qui forcent à réfléchir). La vérité est fuyante, tout de même. Au fait, que pensent vraiment Sonia et Iwona ? On ne les voit, on ne les entend, qu'à travers le regard et les mots d'Alexander. Ca biaise pas mal (pas fait de faute d'orthographe, ouf) et c'est très malin.

Le poids de la religion, la bigoterie d'Iwona, le pétage de plombs de cette "amie" qui devient plus ou moins membre d'une secte, c'est étrange.

Pour finir : je trouve que Stamm est très doué pour faire vivre les personnages secondaires (Antje, les parents ...) qui ne sont pas que des faire valoir. C'est ce que j'apprécie dans le cinéma français des années 30, par exemple, cette façon de mettre en lumière les seconds rôles.
Un bémol ? Le roman avance par cercles concentriques mais je le sens qui s'essouffle, ou plutôt c'est moi qui ..., j'attends qu'un élément vienne relancer la machine.

Vos commentaires, avec gourmandise, j'attends ...

traversay a écrit:

Alors, voilà, j'ai repris là : "Les jours que nous avons passés à Marseille ont sans doute été les plus heureux de notre relation."

bilan après 18 ans de mariage? c'est dur.. mais en quelque sorte je n'ai pas de compassion ni pour l'un ni pour l'autre, ils l'auront voulu ainsi..

traversay a écrit:

Eh, kena, c'est Munich, moi c'est Marseille. 1 an et demi passé là bas, il y a plus de 20 ans déjà. Souvenirs mitigés. Plus rebelle, la vie.

alors un livre qui, en dehors du plaisir de lecture, fait revivre des souvenirs

traversay a écrit:

Moi, je vois la jeune polonaise comme antidote à la perfection douloureuse de sa femme Sonia, intouchable, inacessible, supérieure à Alexander, surtout sur le plan intellectuel et de la volonté.

oui.. pareil.. mais je ne comprends pas son incapacité de voir qu'aucune des femmes n'est 'pour lui' - il lui manque l'énergie de les abandonner toutes les deux et d'essayer si la vie ne lui donnerait pas la chance de trouver une partenaire qui serait plutôt pour lui..
mais tout comme il dit lors de son stage que cela lui arrange de n'avoir pas à prendre de responsabilité, je pense qu'il se 'laisse vivre' et qu'il prend les occasions qui se présentent à lui: le stage pas satisfaisant, la femme 'parfait' mais qui ne peut pas dire qu'elle l'aime et celle à côté qui lui dit qu'elle l'aime mais ne satisfait pas ses exigences qu'il a d'une femme

traversay a écrit:

Stamm sème des indices, il écrit très dense (je ne suis pas d'accord avec vous, ça ne se lit pas si vite que cela. Il y a des tonnes de détails qui n'ont l'air de rien et qui forcent à réfléchir).

oui d'accord.. ce n'est pas à survoler.. néanmoins cela 'se lit vite'.. bien qu'il faut rester vigilant aux indices..
et tout comme tu dis qu'on ne voit pas Sonja ni Iwona qu'à travers Alexandre, je ne le vois lui-même pas bien non-plus.. j'ai l'impression qu'il se décrit d'une certaine distance (je reviens à la scène devant le miroir - il nous fait part de sa vie, de ses expériences.. mais on ne les 'sent' pas..)

traversay a écrit:

(pas fait de faute d'orthographe, ouf)

traversay a écrit:

Un bémol ? Le roman avance par cercles concentriques mais je le sens qui s'essouffle, ou plutôt c'est moi qui ..., j'attends qu'un élément vienne relancer la machine

pour moi il y a encore assez de souffle - peut être aussi parce que je suis au point où il rencontre à nouveau Iwona et je suis curieuse de voir la suite...

Où sont passés les lecteurs en commun ? Ou en êtes vous du livre ?

Bon, page 155, il est écrit ceci. "J'allais rendre visite à Iwona toujours dans la journée."

Les 60 pages qui suivent éclairent un certain nombre de choses et le caractère des Alexander, Iwona et Sonia s'affine. J'attends de voir ce que vous en avez pensé pour poster quelques remarques. Juste une : il y a quelque chose de biblique dans la relation Iwona/Alexander.

Page 215. Il ne me reste plus qu'une cinquantaine de pages à lire. J'aime toujours autant, même si j'ai ressenti une petite baisse de régime au milieu du roman. C'est le genre de livre où l'auteur livre des clés mais sans nécessairement indiquer quelles portes elles ouvrent. Psychologique, énigmatique, riche en détails périphériques. Avant le dénouement, je suis conquis.

traversay a écrit:

Où sont passés les lecteurs en commun ? Ou en êtes vous du livre ?

on attend Epi

non, non.. sur Parfum on n'attend pas Godot, mais Epi

traversay a écrit:

Moi, je vois la jeune polonaise comme antidote à la perfection douloureuse de sa femme Sonia, intouchable, inacessible, supérieure à Alexander, surtout sur le plan intellectuel et de la volonté.

Ce dernier a t-il besoin de s'avilir avec sa relation coupable avec Iwona ? Pourquoi pas de mettre en péril son couple ? Parce qu'il n'est pas à la hauteur de Sonia, de toutes manières.

Comme je le dis plus haut, je pense qu'Iwona lui offre la possibilité, pour une fois, de se sentir supérieur, elle fait du bien à son ego d'éternel moyen (en tant qu'étudiant et architecte, il n'a pas la brillance de Sonja et même Rüdiger).
Il est conscient de ce que cette attirance a d'avilissant car il dit à Antje que ses peintures glauques (les accouplements de chimères) le renvoient à ses propres instincts bestiaux, primaires.
Le couple Iwona/Sonia pourrait incarner cette éternelle dualité corps/esprit, alors ? La première n'étant que chair et l'autre, intellect. Un thème bien rebattu en littérature, cinéma etc, que j'espère Stamm traitera de façon originale, mais c'est bien parti...

traversay a écrit:

Au fait, que pensent vraiment Sonia et Iwona ? On ne les voit, on ne les entend, qu'à travers le regard et les mots d'Alexander.

Oui, la narration épouse complètement le point de vue d'Alex, ce qui me fait encore plus voir dans ce livre un "roman d'éducation".

Nezumi a écrit:

Comme je le dis plus haut, je pense qu'Iwona lui offre la possibilité, pour une fois, de se sentir supérieur, elle fait du bien à son ego d'éternel moyen (en tant qu'étudiant et architecte, il n'a pas la brillance de Sonja et même Rüdiger).
Il est conscient de ce que cette attirance a d'avilissant car il dit à Antje que ses peintures glauques (les accouplements de chimères) le renvoient à ses propres instincts bestiaux, primaires.
Le couple Iwona/Sonia pourrait incarner cette éternelle dualité corps/esprit, alors ? La première n'étant que chair et l'autre, intellect. Un thème bien rebattu en littérature, cinéma etc, que j'espère Stamm traitera de façon originale, mais c'est bien parti...

Tu as tout à fait raison. Citations : "Iwona est sans ambition", "Iwona m'appartient".

Je vais le terminer ce soir. Je n'écrirai plus rien avant que vous ne finissiez, bien sûr.

kenavo a écrit:

traversay a écrit:

Où sont passés les lecteurs en commun ? Ou en êtes vous du livre ?

on attend Epi

non, non.. sur Parfum on n'attend pas Godot, mais Epi

Ohlala j'ai honte
Désolée de vous avoir retardé, vous pouvez reprendre votre lecture normalement, j'ai pas mal avancé depuis hier

Nezumi a écrit:

Iwona, la fille terne et sans charme, est un personnage fascinant car elle est très opaque et énigmatique. L'attrait qu'elle exerce sur Alex est mystérieux. Bien sûr l'amour borné qu'elle lui porte et sa médiocrité lui donnent l'impression d'être brillant (alors que Sonia, la fille parfaite à tout points de vue, le fait se sentir inférieur) mais je pense qu'il y a quelque chose d'autre de plus primal. Iwona me fait penser à la Cecilia de L'Ennui de Moravia, une fille qui n'est qu'un physique mais qui porte un vide qui fascine le narrateur et l'aspire dans une sorte d'abîme. Alex décrit d'ailleurs l'abîme qui se semble se creuser entre lui et Iwona dans la chambre de cette dernière, après leur rapport sexuel avorté.

Je suis tout à fait d'accord avec cette analyse mais c'est tout de même mystérieux cette attirance qu'il nie mais contre laquelle il ne peut rien. Le fait qu'elle le repousse l'excite encore davantage, son physique peu avenant ne le gêne absolument pas. Mais il a honte d'elle et de lui-même. J'aimerais percer ce mystère et j'espère qu'on en saura un peu plus plus tard.

traversay a écrit:

Moi, je vois la jeune polonaise comme antidote à la perfection douloureuse de sa femme Sonia, intouchable, inacessible, supérieure à Alexander, surtout sur le plan intellectuel et de la volonté.

J'aime assez le style mais il ne m'emporte pas et du coup, l'histoire me paraît un peu fade. Alex n'es pas un garçon très intéressant, il est trop indécis (pour les femmes, son travail), il en devient presque inconsistant. Cela changera certainement par la suite mais on dirait qu'il n'a pas de volonté propre. Il ne choisit jamais rien vraiment, c'est grâce à Antje (je ne sais pas bien encore qui elle est) que Sonia s'est décidée pour lui, pour Alice, c'est son ami Rütiger qui a comploté et Ferdi est celui qui a abordé Iwona. Cet homme est médiocre.

J'espère que je vais pouvoir m'y intéresser un peu plus parce que je dois avouer que pour l'instant, je suis loin d'être aussi enthousiaste que vous.
Mais je continue vaillamment

Epi a écrit:

on dirait qu'il n'a pas de volonté propre. Il ne choisit jamais rien vraiment, c'est grâce à Antje (je ne sais pas bien encore qui elle est) que Sonia s'est décidée pour lui, pour Alice, c'est son ami Rütiger qui a comploté et Ferdi est celui qui a abordé Iwona.

C'est très bien vu, je n'avais pas remarqué du tout!
J'en suis au retour du voyage à Marseille. Pendant ce séjour le couple Alex/Sonia s'est formé et on en apprend davantage sur ses bases, qui ne semblent pas être de l'amour ni de l'attirance physique mais une sorte d'idée assez conformiste du bonheur et de la sécurité matérielle. "Je ressentais moins de l'amour que du bonheur, de la confiance et peut-être aussi de la fierté". (p.81)
Il y a aussi cette phrase assez glaçante quand Alex dit que Sonia l'a choisi plutôt que Jakob (individu folklo que celui-là d'ailleurs , Traversay a complètement raison quand il écrit qu'il y a une galerie de personnages secondaires bien croqués): "Jakob n'avait pas eu de veine, il était arrivé trop tard. Et pourtant il l'aimait probablement plus que jamais je n'avais été capable de le faire. Peut-être était-ce pour cela qu'elle m'avait choisi." (p.97)
Ces deux-là semblant se chercher un partenaire de vie plutôt qu'un amoureux, on peut dire que cela annonce les difficultés de leur couple ?
Cette conception intellectualisée du couple, sans véritable chaleur et intimité physique, est renforcée par le rêve éveillé d'Alex, où il s'imagine vivre avec Sonia à la Cité Radieuse, une vie idéalisée avec enfants, atelier magnifique, ciel éternellement bleu etc.Il dit que cela ressemblerait à "un film français des années cinquante ou soixante, toute notre vie était un film, uniquement fait d'une succession de panoramiques, de grands espaces en plein soleil de midi dans lesquels évoluaient de petits personnages, le tout très esthétisant, très distant, très intellectuel. " (p.76) Je ne vois pas trop lesquels, peut-être une allusion aux films de ces années traitant de l'incommunicabilité, comme chez Godard ou Antonioni ?

Oui, c'est exactement ça, et je les ressens comme des êtres dépourvus de véritables sentiments profonds, surtout Alex. L'histoire commence à m'intéresser beaucoup plus maintenant que j'ai avancé, j'ai hâte de connaître la suite.

Je ne sais pas s'il fait référence à des films précis mais c'est vrai que dans certains de ces années là, on montrait souvent des couples menant une vie qu'on voulait faire passer pour idéale, ou en tout cas qui devait être un modèle.

Epi a écrit:

L'histoire commence à m'intéresser beaucoup plus maintenant que j'ai avancé, j'ai hâte de connaître la suite.

Pareil.
C'est étrange comme cette histoire scotche, hein!

Nezumi a écrit:

Epi a écrit:

L'histoire commence à m'intéresser beaucoup plus maintenant que j'ai avancé, j'ai hâte de connaître la suite.

Pareil.
C'est étrange comme cette histoire scotche, hein!

Oui, je ne l'aurais jamais cru au début pourtant

Epi a écrit:

Nezumi a écrit:

Epi a écrit:

L'histoire commence à m'intéresser beaucoup plus maintenant que j'ai avancé, j'ai hâte de connaître la suite.

Pareil.
C'est étrange comme cette histoire scotche, hein!

Oui, je ne l'aurais jamais cru au début pourtant

Et il se passe quelque chose d'inouï entre les pages 150 et 200. Y êtes-vous ?