Lecture en commun - Laurent Binet : HHhH

Ah oui ça pour être faible...

Kena tu peux nous rajouter, Mimi54 et moi, je tenterai donc...

c'est fait

mmm je vous aurais bien rejoints pour celle là, mais 1) je vais galérer pour le récupérer 2) vu mon rythme sur JCO, je pense que ma prochaine lecture sera dans au minimum 2 ans et demi.

Si la prochaine LC ca pouvait etre Oui oui en anglais, ca serait top !! (Il s'appelle Yes Yes en anglais ? )

Shay a écrit:

Si la prochaine LC ca pouvait etre Oui oui en anglais, ca serait top !! (Il s'appelle Yes Yes en anglais ? )

tu sais que tu peux faire toutes sortes de proposition pour une/des lecture(s) en commun ici

Demain c'est le grand jour, on commence HHhH...

Je pense commencer le lundi de Pâques (il va pleuvoir....)

je pense commencer ce soir !

je vois que les commentaires se bousculent... J'entame donc ! Pour commencer j'apprécie le renoncement au genre romanesque de Binet, un parti pris peu évident pour un auteur qui n'est pas historien mais qui ne veut pas détourner son personnage principal (R. Heydrich) de sa véritable histoire. J'aime d'autant plus que Binet ne fait qu'échapper à son intention/ambition pour mettre en scène son personnage (tout en cherchant à rendre réel chaque évènement). Binet dit ne rien inventer, alors qu'à partir du moment où l'on quitte le réel pour mettre une vie sur le papier, on tombe dans le fictionnel, il continue à dénier toute forme d'improvisation. Pourquoi pas ? Tant que ça ne gêne pas le lecteur...

Je regrette essentiellement deux choses : d'une part le ton légèrement arrogant de l'auteur au début du récit : "Regardez comme je suis intelligent et comme je suis savant...", bon... et puis le fait qu'il se soit bien gardé de citer la manière dont d'autres auteurs se sont emparés de personnages historiques. Je pense en particulier à Central Europe de T. Vollmann, Zone de M. Enard et Démon de Thierry Hesse,ces trois auteurs reprennent à leur compte des épisodes de la seconde guerre mondiale pour les inclure dans une 'histoire', un roman, et ces trois essais sont époustouflants de crédibilité, de virtuosité stylistique et de véracité. Binet s'arrête un instant sur le compte de Robert Merle pour le rayer rapidement (voir le railler...), un petit peu d'humilité aurait alors été pas mal venu, il me semble.

Ceci posé, si on passe sur la pauvreté du style et sur la volonté un peu trop appuyée (artificielle ?) de vouloir 'faire vrai', le livre de Binet est dans sa structure une oeuvre très intéressante. Découpé en très courts chapitres, le livre tourne lentement autour de son personnage principal comme un bourdon autour d'un myosotis (c'est de saison) avant de titiller les évènements pour en extraire la moelle (le pollen, donc). La richesse des informations est parfaitement mise en valeur, Binet ne s'amuse pas à balancer tout son savoir d'un trait, au contraire, il le distille, permettant au lecteur de découvrir peu à peu les éléments qui doivent le conduire à un certain attentat manqué (à la page 70 où je suis, nous n'en savons guère plus sur cet évènement qui semble pourtant être le nerf, le moteur, le but ultime de l'écrivant).

Très documenté, très didactique, Binet construit lentement autour de son personnage des fondations qui permettent de le cerner au fur et à mesure de son évolution dans cette Allemagne des années 20 à 30... Et même si Heydrich est odieux, une 'bête blonde', un 'boucher', on se retrouve dans la fascination/obsession qu'éprouve l'auteur pour son personnage... et on a hâte de savoir la suite (comment l'homme s'est construit, comment Binet va nous conduire jusqu'à son 'fameux' attentat)...

j'ai lu une cinquantaine de chapitres;Le mélange entre le documentaire, et la narration de l'auteur sur sa propre recherche, sur ses motivations, me plaisent.
L'originalité du récit au début m'a surprise, mais m'a assez vite emballée.
J'attends de m'y remettre de plus près pour en dire plus

On ne peut pas réécrire l'Histoire, mais c'est toujours un peu trop facile de juger après coup ceux qui l'ont faite.

Binet ne se gêne pas pour dénigrer les responsables européens qui n'évitèrent pas la guerre et ne vinrent pas au secours de la Tchécoslovaquie démembrée par les nazis. Pour lui, Chamberlain était un 'crétin', Daladier un 'imbécile', Saint-John Perse une 'merde'. Certes nos dirigeants n'ont pas vraiment brillé dans cette histoire, mais de là à les traiter à la limite de l'insulte et de l'irrévérence n'apporte rien au propos, à part sombrer dans la trivialité.

On peut s'inquiéter que la haine rageuse qui jaillit des pages sur les hommes politiques français et (surtout) anglais ne trouve d'ailleurs pas d'écho pour parler des nazis. Binet souligne la face de hamster de Himmler (ce qui nous fait une belle jambe) ou les costumes militaires chamarrés de Göring (on frole le ridicule), mais jamais il ne met autant de haine à parler des nazis que des Alliés... sans doute, emporté par son propos l'auteur éprouve trop de fascination pour ses personnages et n'a pas le recul nécessaire pour les juger comme il le fait des autres... on peut s'en étonner, perso je m'en écoeure.

Car, il me semble qu'il aurait été beaucoup plus judicieux, intéressant et complet de tenter de montrer pourquoi les dirigeants alliés ont réagi avec tant de pusillanimité plutôt que de les brûler sur le bûcher d'une ridicule inquisition post-moderne.

Binet écrit qu'il est le descendant de juifs et de communistes.

Il faut donc se rappeler que la France était un pays coupé en deux par l'antisémitisme. Se souvenir qu'en 1900, la France se déchire avec l'épisode de l'Affaire Dreyfus, d'un côté les 'libres-penseurs' emmenés par Zola et de l'autre les patriotes, les nationalistes passés sous la bannière de Barrès. Se souvenir par exemple des tergiversations du jeune Gide, qui finira par rejoindre le clan Zola malgré son propre antisémitisme latent, inhérent à une culture... Je ne pense pas que trente ans plus tard les mentalités aient évolué au point que tous les nationalistes et patriotes français se soient mis à être philosémites.

Rappeler à la place de Binet (qui s'en garde bien) qu'à l'époque les communistes étaient majoritairement pacifistes et donc antimilitaristes, qu'ils réclamaient haut et fort une démilitarisation des pays européens avec l'idée naïve qu'en faisant disparaitre les armes on ferait disparaitre la guerre. Se rappeler qu'en 36, ce n'est pas une armée mais des individus qui ont décidé de partir en Espagne combattre la montée du fascisme. Se pencher par exemple, sur le dilemme violent, passionné de Simone Weil (la philosophe), communiste, pacifiste et catholique (il est écrit dans la Bible : tu ne tueras point) et qui renonçant à écouter le parti, sa foi ou son esprit, se rend à Madrid pour soutenir les anti-fascistes.

Rappeler enfin que l'Europe reste profondément marquée par le souvenir de la guerre de 14-18, cette boucherie qui a été l'une des plus meurtrière et l'une des plus mutilante du siècle. Et qui fut suivie par la grippe espagnole, laissant une Europe exsangue, ruinée, éreintée et malade. Qui pouvait avoir envie de recommencer ça ? Je me souviens de mon arrière-grand-père blessé sur le Chemin des Dames et qui a tout fait pour éviter la mobilisation de ses fils en 40... et il n'était pas communiste et il était patriote.

Bon je crois que je suis un peu en colère. Je reconnais par contre que tous les propos (ou presque) qui concernent de près Heydrich sont extrêmement intéressants.

shanidar a écrit:

Bon je crois que je suis un peu en colère. Je reconnais par contre que tous les propos (ou presque) qui concernent de près Heydrich sont extrêmement intéressants.

navrée de lire que tu t'es mise en colère.. mais c'est très intéressant de lire ce que tu as écrit

Oui, très! Et ça me suffira pour me consoler de ne pouvoir vous suivre sur cette LC vu que le bouquin n'est plus disponible à la bibli...
Mais je continue à lire vos impressions!

Je n'ai pas encore le roman à disposition mais je suis également avec intention vos commentaires

je n'ai pas ces impressions après 80 pages lues.....une impression assez neutre, je dois dire
une recherche sur un fait historique, avec l'auteur qui commente sa recherche
c'est à peu près tout ce que je peux dire de ce livre, qui ne m'inspire pas beaucoup de commentaire....
pourquoi? j'espère pouvoir expliquer après avoir lu un peu plus, et surtout j'espère que le livre va déclencher un peu plus de réaction de ma part, car pour le moment, ....bof bof

ta réaction me surprend, shanidar. lors de sa sortie j'avais beaucoup apprécié HHhH et ces défauts ne m'avaient pas sauté aux yeux, je vais le remttre sur ma PAL pour le relire peut-être différemment