LC Science Fiction

Dur d'établir une comparaison, je n'ai pas lu La planète des singes...

colimasson a écrit:

Dur d'établir une comparaison, je n'ai pas lu La planète des singes...

J'avais bien aimé Contes de l'absurde, surtout la nouvelle Une nuit interminable : un délire à partir de paradoxes temporels (un sujet que j'aime beaucoup, et qu'on retrouve par exemple et entre autres dans Docteur Futur, de Philip K. Dick) : un type à notre époque, deux autres types arrivent : un du futur en route vers le passé, et l'autre venant du passé en route vers le futur... Ça s'exprime en latin pour mieux se comprendre...

Premiers pas dans le monde inverti de Priest.

Un prologue très mystérieux : nuit de fête. Une femme depuis peu membre de la communauté, du village ?, où a lieu cette fête (un peu tribale sur les bords). Apparemment elle arrive à y creuser sa place, pas comme un gars, plus loin, dans l'ombre.
Elle croise un membre du village, qui rentre chez lui. A l'air d'avoir peur ? Mystère. Fin du prologue.

Et l'histoire commence.
Plongée direct dedans. Première phrase

Citation :

J'avais atteint l'âge de mille kilomètres.

Pas de doute, c'est de la SF/Fantastique.
Je suis toujours un peu perplexe devant des traficotements basiques comme ça, j'attends l'explication de cet âge en distance. Evidemment, la réponse n'arrive pas tout de suite.

Le narrateur est un jeune garçon - il vit dans une crèche mais vu son langage on peut supposer qu'il est adolescent - près à vivre un changement dans sa vie.
Deuxième phrase :

Citation :

De l'autre côté de la porte, les membres de la guilde s'assemblaient pour la cérémonie qui ferait de moi un apprenti.

Mystère de plus : Guilde ? Apprenti ?

Le récit avance, c'est linéaire, et écrit simplement. Pas de chichiteries, pas de longues descriptions du monde dans lequel on entre. L'auteur choisit le procédé basique mais efficace de nous mettre "dans la peau" de son narrateur qui découvre un nouvel univers. Pas à pas, tranquillement, l"histoire avance.
Et les briques de son monde apparaissent.

La crèche ressemble à une prison :

Citation :

[...]petit bâtiment, exactement au sud de la cité. Elle était presque entièrement enclose de murs : un terrier complexe de couloirs, de chambres et de salles. Impossible d'accéder au reste de la ville sinon par une unique porte, fermée en temps normal ; nous ne pouvions prendre d'exercice que dans le petit gymnase et dans la minuscule cour à ciel ouvert, entourée de hautes murailles sur les quatre côtés.

On apprend un peu plus que la ville aussi est enclose dans des murs. Que peu de gens en sortent, à part, justement, les membres de guilde - notamment celle des Topographes du Futur dans laquelle le jeune garçon veut entrer (faut que je vérifie : je crois qu'on ne sait pas son nom ou alors je l'ai zappé). (Vérifié : Helward Mann)

Mais il n'était pas malheureux : une mère absente (disparue ?), un père trop occupé par son travail (membre de la guilde des Topographes du Futur), quelques copains dans la crèche (notamment un - Gelman Jase (ah on échappe pas aux noms étranges aussi, quoique là au moins il n'est pas trop farfelu) parti quelques temps avant pour rejoindre une autre guilde).

Jour de cérémonie : il apprend qu'il fait un pacte à la vie à la mort. S'il trahit, il en payera de sa vie. Helward hésite un tout petit peu (personne ne l'avait prévenu d'un tel pacte).
Il va retrouver sa future épouse, qu'il a déjà croisé quelquefois à la crèche.

Ambiance très mystérieuse lors de cette cérémonie d'intronisation. A sentir quelque chose de louche : aucun jeune membre de guilde n'est présent. Helward suppose qu'ils sont tous en mission à l'extérieur. Mais tout de même... un questionnement presque inquiétant. Les membres des guildes sont secrets, distants, autoritaires.

Helward va se coucher après toutes les festivités.
3h du matin, il est réveillé. Et ... emmené en dehors de la cité.

Citation :

[...]ce n'était que ténèbres impénétrables. Je n'avais aucun point de repère, rien qui me permit de discerner des formes ou des contours. C'était effrayant, mais seulement d'un point de vue émotif : je ne me sentais pas menacé physiquement. [...]
froid mordant, [...] précision stupéfiante de mes nouvelles perceptions d'espace et de dimensions.[...]
Une sensation nouvelle m'assaillit : je humais l'odeur de la terre ! C'était différent de tout ce que j'avais pu sentir dans la ville et mon esprit évoqua l'image erronée de nombreux kilomètres carrés de sol d'un brun chaud, humide dans la nuit. Je n'avais aucun moyen de définir l'odeur qui me parvenait réellement - ce n'était probablement pas de la terre - mais cette vision d'un pays riche et fertile était l'une de celles qu'avait laissées en moi la lecture d'un des livres de la crèche.

Ensuite il voit son premier levé de soleil (plus beau moment de sa vie), voit un vol d'oiseau ("qu'est-ce que c'est ? - Des oies sauvages") et Futur Denton (son guide jusque là) et Helward doivent descendre de leur plate-forme et mettre un pied sur un terrain naturel.


Priest, étrangement, utilise souvent l'interrogation et rétablit l'erreur de son incohérence dans la même foulée : Helward sent l'odeur de la terre, là je me dis : comment sait-il que c'est l'odeur de la terre, Priest précise immédiatement qu'Helward pense reconnaître l'odeur de la terre grâce à ses connaissances théoriques.

Du coup, on sent que Priest n'est pas un idiot, qu'il va essayer de rester logique et ne pas trop en rajouter dans le fantastique.
Son narrateur naïf va être pratique pour ça aussi.

Des chapitres courts, une histoire qui avance rapidement en découvertes. Je n'ai même pas atteint la 30ème page.
J'apprécie qu'il n'y ai pas de descriptions à rallonge, pas de questionnements psycho-sociologiques pseudo intellectuels.
Ça a l'air simple, efficace, et prenant.

J'ai commencé Julian, de R.C. Wilson. Un univers post-apo, militarisé, sans pétrole ! Les gens voyagent à cheval ou par le train à charbon. La religion est toute-puissante, le pays est en guerre. Deux jeunes gens décident d'échapper à la conscription en s'évadant. On se croirait plutôt dans roman d'aventures.

Et moi je suis sur l'étoile à neutrons l'Oeuf du Dragon, où la gravité est 250000 plus forte que sur Terre, mais où la vie commence à se développer...

plongée totale dans Hypérion, j'apprécie tout particulièrement le parti pris de Simmons de ne pas tout expliquer des changements dans l'univers. Je ne comprends pas toujours tout mais, lentement, une certaine image se forme, une image assez fascinante. Je viens de finir la lecture du récit du prêtre-ethnologue parti à la recherche de la tribu des Bikuras et cette aventure dans l'aventure (récit enchâssé) est passionnante. Simmons parvient à construire un univers cohérent avec des paysages surnaturels, tout en y mêlant astucieusement le culte d'une religion étrange, presque diabolique, et puisque l'existence du diable prouve l'existence de dieu, l'intervention du prêtre Duré (prêtre d'une Eglise catholique qui se meurt) est emprunte d'un mysticisme et d'un humanisme qui soulève bien des interrogations.

J'arrive, j'arrive.... J'ai pioché un peu partout pour trouver deux, trois livres SF.

J'ai sous les yeux deux classiques :

Blade runner de Philip K. Dick

Je suis une légende de Richard Matheson.

Et un recueil de nouvelles - qui est peut-être aussi un classique : Le haut-lieu et autres espaces inhabitables de Serge Lehman.
Je commence par ce dernier.

Vous avez l'air bien dépaysés par vos lectures SF !

Pour ma part (Les jeux de l'esprit de Boulle), j'ai plutôt l'impression de m'ancrer dans un présent très actuel à base de lynchage politique...

Citation :

Parbleu, interrompit Zarratoff. J'ai eu, une fois dans ma vie, un entretien avec un ministre. Je me suis aperçu au bout de deux minutes qu'il était très fier de savoir que la Terre tourne autour du soleil. Sa connaissance du monde n'allait pas plus loin. Il ignorait que le soleil est une étoile; quant à la Galaxie, c'était pour lui un mot poétique sans aucune signification réelle.

Dans leur délire utopique, les scientifiques se mettent en tête l'idée de chasser les hommes politiques pour mettre en place un gouvernement mondial scientifique. On sait déjà que le rêve va tourner au vinaigre. Pourquoi et comment ? Hé hé, je ne sais pas encore...
Mais visiblement, l'opposition manichéenne des premières pages est faite pour être mise en pièces.

Le style est un peu creux, pas mal de clichés (argh, ça me fait parfois presque penser à La nuit des enfants rois, mauvais souvenirs...) mais l'intrigue est efficace. Ca me donne envie de poursuivre...

L'Oeuf du dragon, de Robert L.Forward

Tiens, puisque tu lis Le Monde Inverti Queenie, je serai curieuse de savoir comment tu en interpréteras la fin, plutôt étrange...

J'ai Ubik de Philip K. Dick, je vais essayer de le lire dans le mois.

Queenie a écrit:

Étant donné qu'on ne lit pas le même livre, ce serait bien de préciser dans chaque fil de quel roman on parle.

Je me suis laissée emporter...
Précision ajoutée

nezumi a écrit:

L'Oeuf du dragon, de Robert L.Forward

Tiens, puisque tu lis Le Monde Inverti Queenie, je serai curieuse de savoir comment tu en interpréteras la fin, plutôt étrange...

Ah... ok, on verra ça !



Helward est vraiment un personnage très passif et très... spongieux. Mais pas antipathique pour autant... Juste qu'il n'a pas trop de personnalité. Il est la page blanche où s'écrit l'histoire.

On l'amène auprès de Malchuskin, un Voies, et se retrouve à travailler comme un forçat avec lui et des hommes qui ne sont pas de la ville. Leur travail : retirer les voies que la cité a utilisé pour avancer, et les amener à l'avant, là où la cité les utilisera pour continuer à avancer.
Oui : on apprend que la Cité est en fait une sorte de vaisseau géant (en bois principalement), qui glisse sur des rails pour avancer, ou en tout cas se maintenir tout près, vers l'Optimum.
Un travail de Sisyphe :

Citation :

L'optimum se déplace constamment. Mais il est peu vraisemblable que nous y arrivions et cela n'a pas d'importance. N'importe où dans un rayon de quelques kilomètres, cela suffit. Pour parler clairement, si nous pouvions devancer l'optimum même dans une faible mesure, nous pourrions tous jouir d'un long repos.

Qu'est-ce que l'optimum ? Pourquoi se déplace-t-il ? Pourquoi la cité doit-elle en être si proche ?
Aucune idée.

Mais du coup, on apprend pourquoi l'âge se compte en kilomètres : ce sont les kilomètres qu'auraient idéalement parcourus la cité depuis la naissance de la personne. (La cité devrait se mouvoir d'environ un dixième de kilomètre par jour. Un kilomètre pour une dizaine de jours. Trente-six km et demi pour une année).
... ce qui voudrait dire qu'Helward a... un peu plus de 27 ans !!!

Bref Helward ne trouve pas étrange, en tant qu'apprenti du Futur, de travailler avec un Voies, il fait ce qu'on lui dit. Découvre comment entrer et sortir de la cité, qu'il est maintenant différent de ses anciens camarades, qu'il ne peut plus communiquer librement avec eux, et que l'activité physique donne des courbatures mais raffermit aussi le corps.

Bref. On découvre peu à peu ce monde inverti à travers les yeux d'un personnage un peu poisson-bulle. J'espère qu'à un moment, il gagnera un peu en caractère.
Ce caractère un peu désertique et naïf me fait penser à Dune (mais, shame on me, je n'ai pas lu le livre, je ne parle donc que de mes impressions cinématographiques).

Ma couverture du livre montre bien l'image de cette ville sur ces voies. Ainsi que leur soleil étrange.




Helwark le poisson-bulle, même Malchuskin s'en étonne :

Citation :

Vous voulez contempler le crépuscule ?
- Non... pourquoi ?
- Les apprentis le font en général.
- Bien.
Comme pour lui être agréable, je sortis et portai mon regard vers l'horizon, derrière la ville. Malchuskin vint me rejoindre.
[...]
(Le soleil) avait l'aspect d'un grand disque orangé un peu incliné vers nous. Au-dessus et au-dessous, de grandes flèches de lumière pointaient à partir du centre. [...]
- Si vous dormiez en ville, vous n'auriez pas la chance de voir cela, dit Malchuskin.
- C'est très beau.
- Vous avez vu le lever du soleil ce matin ?
- Oui.
[...]
- Que vous a-t-on enseigné ?
- Que le soleil est une sphère.
- Ainsi ils racontent toujours cela ! Eh bien, vous avez maintenant constaté qu'il n'est pas sphérique. Qu'en déduisez-vous ?
- Rien.
- Vous y réfléchirez.

Le Haut-Lieu

Première nouvelle du recueil de Serge Lehman... Un grand appartement sur l'île Saint-Louis, oublié. Anne Murat, de l'agence immobilière doit le faire visiter à David Lance. La visite va se transformer en huis-clos, dans cet appartement du sixième étage qui, peu à peu, fait disparaître les portes et les pièces les transformant en trompe l'oeil remarquablement exécuté. La nouvelle est courte, terriblement efficace... On sent bien monter l'angoisse des deux personnages qui sont confrontés à leurs peurs les plus intimes, se retranchent en eux devant la crainte grandissante de se retrouver emprisonnés dans un trompe l'oeil.... Calcifié, comme ils nomment très vite ce phénomène étrange. Les personnages semblent perdre peu à peu leur humanité alors que l'appartement semble habité par une terrible humanité.

Les ressorts sont plus ceux du drames que ceux du fantastique, mais la cause est bien fantastique, elle. Très, très efficace.