Lecture en commun - Nancy Huston : Lignes de faille

Chatperlipopette a écrit:

Oui, je sais mais comme je ne me suis pas connectée régulièrement (because réunions et journée de merde !!!!) j'ai laissé filer la date.

Mais le mois est loin d'être fini ?????

Nezumi a écrit:

C'est bizarre qu'un moment crucial comme la mort de Janek soit absent du récit, on y fait juste allusion, une évocation en creux...

Ah bon ? où est l'allusion à sa mort ? je ne l'ai pas vue

Camille19 a écrit:

Nezumi a écrit:

C'est bizarre qu'un moment crucial comme la mort de Janek soit absent du récit, on y fait juste allusion, une évocation en creux...

Ah bon ? où est l'allusion à sa mort ? je ne l'ai pas vue

si je ne me trompe... dans le chapitre de Randall - je suis aussi allé relire ces lignes.. je savais qu'il y a eu un 'mari' de Sadie qui est mort d’un suicide.. et je ne me rappelais plus lequel

Ah ben tu es une lectrice plus attentive que moi

Kenavo a ecrit:
je savais qu'il y a eu un 'mari' de Sadie qui est mort d’un suicide..
Un mari de Erras plutot , a cette epoque-la Sadie avait moins de 10 ans
Sans blague, les filles, tout est a sa place dans le livre. A quoi bon parler de la mort de Janek? Il n'etait plus l'enfant que Erra-Cristina a connu en Allemagne, et adulte, il ne faisait que se souler de gyn. Sadie a assez endure a cote de sa maman adoree et convoitee.
On ne peut juger personne, je pense que la structure psychologique des personnages est geniale.
Le but de N.H. n'etait pas une description des evenements sociaux et politiques. Ils servent de fond justifient bien les actes des personnages.

Orientale a écrit:

Un mari de Erras plutot

ah mais oui, bien sûr..
voilà Camille, tu vois, ma réputation de lectrice attentive s'envole

*se cache les yeux pour ne rien voir*

je suis la mauvaise élève, je n'ai pas fini la lecture mais il me reste quelques 40 pages donc j'y suis presque !!

Orientale a écrit:

Kenavo a ecrit:
je savais qu'il y a eu un 'mari' de Sadie qui est mort d’un suicide..
Un mari de Erras plutot , a cette epoque-la Sadie avait moins de 10 ans
Sans blague, les filles, tout est a sa place dans le livre.

Il me semble au contraire que c'est un événement important et traumatique car l'arrivée de Janek est à la fois cruciale dans la relation Erra/Sadie et déterminante dans le tour que va prendre la suite de l'histoire.

D'abord parce que c'est suite à son arrivée que la vie familiale naissante de Sadie vole en éclats. Erra va se séparer de son mari Peter pour vivre avec Janek jusqu'à son suicide, quelques années plus tard. Sadie se retrouve à nouveau sans père (Janek ne la calcule même pas) et la mère et la fille vont dès lors recommencer à s'éloigner l'une de l'autre.
C'est également à ce moment que Sadie se rend compte des origines allemandes de sa mère et développe ce complexe de culpabilité qui va mener à sa conversion au judaïsme.
Sans la réapparition de Janek dans la vie d'Erra, Sadie serait devenue quelqu'un de différent, sans doute plus équilibrée et moins obsédée par ses origines. Et partant de là, l'existence et la personnalité de Randall et Sol auraient été également autres.

Même s'il n'est pas beaucoup présent dans le roman Janek a vraiment une action de déclencheur, de catalyseur. N'oublions pas le rôle qu'il joue dans la vocation musicale d'Erra, aussi bien en ce qui concerne les chansons sans paroles que le fameux luth.

Quand je dis que son suicide n'est pas évoqué directement, je n'envisage pas cela comme une critique de l'intrigue, Orientale. Je pense juste qu'il y a un contraste entre l'importance de Janek dans l'enchaînement des événement et l'évocation discrète, presque en passant, de sa mort. On peut penser à l'impact qu'elle a pourtant dû avoir sur Erra et même Sadie ...Son suicide montre aussi que les blessures du passé (les lignes de faille) sont profondes et insurmontables. Même si Erra, elle, offre le contre-exemple de quelqu'un qui a réussi à vivre avec son traumatisme, essentiellement grâce à l'art.

Nezumi a ecrit:

Citation :

Je pense juste qu'il y a un contraste entre son importance dans l'enchaînement des événement et l'évocation discrète, presque en passant, de sa mort. On peut penser à l'impact qu'elle a dû pourtant avoir sur Erra et même Sadie ...

Je suis d'accord avec toi, Nezumi, en me disant que la mort de Janek peut etre vraiment consideree comme une pierre cruciale dont l'auteur ne parle pas. Il ne nous reste que le symbole et les conclusions a en tirer sur tous les atteints, toutes les attein(E)s plutot. Erra a finalement trouve la solution de ses elans affectifs et sexuels dans l'amitie et l'affection entre femmes.
Sadie a banni sa mere de son univers depuis le moment ou elle l'a vue faire l'amour avec Janek et un peu plus tard, je crois, Sadie etait consciente de sa fixation aux victimes de la guerre, aux victimes des allemands.
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Il y avait un passage du chapitre "Randall" que je n'ai pas tres bien compris, moi non plus - la ou Sadie parlait de ces "putes chouchoutes par les allemands qui attendaient leur enfant en se prelassant...etc". Dans les "Fontaines de vie" donc, il n'y a pas eu que des enfants voles de l'Est... C'est a revoir, je vais un peu lire sur Lebensborn.

Orientale a écrit:

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Il y avait un passage du chapitre "Randall" que je n'ai pas tres bien compris, moi non plus - la ou Sadie parlait de ces "putes chouchoutes par les allemands qui attendaient leur enfant en se prelassant...etc". Dans les "Fontaines de vie" donc, il n'y a pas eu que des enfants voles de l'Est... C'est a revoir, je vais un peu lire sur Lebensborn.

Moi non plus je n'ai pas tout à fait compris si Erra avait été volée à une famille ukrainienne ou si elle était née d'une ukrainienne dans un de ces Lebensborn.
A un moment il est question d'une famille qui la réclame à la fin de la guerre (je crois que c'est la femme de l'agence américaine qui en parle, dans le chapitre "Erra"). Mais en même temps Kristina (chap."Erra") a ce genre de cauchemar où elle rêve d'un orphelinat avec des femmes qui allaitent et qui semblent correspondre à ces "putains" décrites par Sadie.

Nezumi a écrit:

Orientale a écrit:

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Il y avait un passage du chapitre "Randall" que je n'ai pas tres bien compris, moi non plus - la ou Sadie parlait de ces "putes chouchoutes par les allemands qui attendaient leur enfant en se prelassant...etc". Dans les "Fontaines de vie" donc, il n'y a pas eu que des enfants voles de l'Est... C'est a revoir, je vais un peu lire sur Lebensborn.

Moi non plus je n'ai pas tout à fait compris si Erra avait été volée à une famille ukrainienne ou si elle était née d'une ukrainienne dans un de ces Lebensborn.
A un moment il est question d'une famille qui la réclame à la fin de la guerre (je crois que c'est la femme de l'agence américaine qui en parle, dans le chapitre "Erra"). Mais en même temps Kristina (chap."Erra") a ce genre de cauchemar où elle rêve d'un orphelinat avec des femmes qui allaitent et qui semblent correspondre à ces "putains" décrites par Sadie.

Intéressant ça parce que pour moi justement, il ne faisait aucun doute qu'elle a été volée à sa famille (ce qui est arrivé réellement à beaucoup de famille) et a fait un bref séjour dans cet orphelinat. Il faudra que je relise ce passage parce que maintenant que vous vous posez la question, cela m'intrigue.

"Lignes de failles" m´a aussi obligée à regarder de plus près de quoi s´agissait cette opération "Lebensborn" ou Fontaines de vie dont je n´avais jamais entendu parler et dont Nancy Huston est allée fouiller le peu d´archives encore existantes et non détruites, afin de situer l´histoire d´Erra.

Lu sur " Critiques libres":
"Le seul regret est que Nancy HUSTON introduit un fait historique "les fontaines de vie" qui était un programme des nazis pour "produire" des enfants aryens en les volant à leurs parents polonais, ukrainiens, ... et en les plaçant dans des familles proches des SS. Pourtant on apprend très peu de choses sur ce fait même dans la dernière histoire (celle de l'arrière grand mère Kristina) et c'est bien dommage. Cependant les sources que l'auteure donne en fin de livre permettent d'en savoir davantage"

Je ne pense pas que ce soit une erreur de la part de l´auteur de ne pas entrer de manière plus profonde dans le sujet "Lebensborn". ( Le roman fait déjà 480 pages!).
En fait, en renonçant à parler de manière plus exhaustive de cette sombre page de l´histoire du nazisme, Nancy Huston oblige le lecteur curieux à faire lui-même ses recherches, de première main.
L´économie de ses explications dans la " Note d´auteur", à la fin du livre, est une claire invitation faite au lecteur, en ce sens.

Nezumi a écrit:

Il me semble au contraire que c'est un événement important et traumatique car l'arrivée de Janek est à la fois cruciale dans la relation Erra/Sadie et déterminante dans le tour que va prendre la suite de l'histoire.

tout à fait d'accord avec toi.. j'ai adoré la partie où Sadie se retrouve avec Peter et le bonheur qu'elle éprouve de faire partie d'une vraie famille.. et en effet l'arrivée de Janek est cruciale pour son développement

Orientale a écrit:

il n'y a pas eu que des enfants voles de l'Est... C'est a revoir, je vais un peu lire sur Lebensborn.

ah non, il y a eu des foyers Lebensborn un peu partout: en Allemagne, Autriche, Pologne, Luxembourg, Belgique, France, Hollande et Norvège (surtout dans ce pays un grand 'afflux': environs 12.000 enfants nés dans plusieurs foyers. Pour la discrimination des enfants et de leurs mères, le président Kjell Magne Bondevik s'est excusé en l'an 1998)
et surtout les enfants en Allemagne et Norvège ont fondé des associations d'entraide

Swallow a écrit:

L´économie de ses explications dans la " Note d´auteur", à la fin du livre, est une claire invitation faite au lecteur, en ce sens.

je pense aussi qu'elle n'a pas voulu encore ajouter plus.. et cela n'aurait pas aporté plus à cette histoire - surtout que le phénomène Lebensborn vaut un roman de 480 pages à lui seul

https://www.dailymotion.com/video/x446jx_lebensborn-race-aryenne-germanonord_news

Pour s´y retrouver : les archives, et puis les recherches des descendants afin de savoir qui furent leurs géniteurs.

D'accord avec Swallow, je pense que l'auteur nous invite à en savoir plus et à rechercher par nous-même. C'est drôle d'ailleurs, car tout au long du roman, on voit les dégâts qu'ont provoqué les recherches de Sadie sur sa vie familiale et même sa santé (aurait-elle eu cet accident si elle n'était pas allée en Israel pour enquêter?). Un peu comme si c'était y la boîte de Pandore qu'il ne fallait pas ouvrir.
Je ne sais pas si j'essaierai d'en lire plus sur ces lebensborn car je trouve ce sujet vraiment terrible.

Sinon je voulais vous dire que je suis super contente d'avoir fait cette lecture avec vous les filles!